Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/409

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais cette douce illusion dut prendre fin à la lumière de la critique contemporaine.

Quand on aborda l’étude sérieuse du boudhisme et qu’il fallut S’occuper de la personnalité même de Sakia-Mouni, on fut obligé de regarder les choses en face. Ce fut alors une grande surprise pour les savants que d’apprendre que le Boudha, d’après toutes les statues qui lui ont été élevées par ses sectateurs, était représenté comme un véritable nègre ; il était un peu rougeâtre, mais assez laid de visage, et portait des cheveux crépus. Les partisans de la légende indo-européenne, en furent d’autant plus scandalisés qu’ils avaient été les premiers à déclarer que Sakia-Mouni n’appartenait pas à la caste des soudras, ni même à celle des vaycias, mais était de la plus illustre origine, étant fils de Çuddhôdana, roi de Kapilavastu. L’agitation scientifitique, pour être peu bruyante, ne fut pas moins grande. On essaya de tout réparer par une théorie ingénieuse, mais la vérité une fois lancée souffre-t-elle qu’on la farde ?…

D’ailleurs, dès le commencement de ce siècle, à peine une quarantaine d’années, après que la constance et le courageux dévouement d’Anquetil Duperron avaient tourné l’esprit de l’Europe vers les études sanscritiques, un savant modeste et consciencieux, Langlès, auteur des Monuments anciens et modernes de l’Hindoustan, avait déjà remarqué la vérité sur l’origine ethnique du Boudha et l’avait soutenue de toute son érudition. Mais qui voulut entendre de cette oreille ? De toutes parts, on protesta avec véhémence contre un fait dont la seule supposition parut une grande insulte à la race blanche. L’opposition ne vécut pas longtemps et l’intelligent Langlès passa sans doute pour un ignorant.

« Une hypothèse étrange, dit Ampère, avait prétendu faire de Boudha un nègre, arguant d’une disposition bizarre de la chevelure que présentent fréquemment les sta-