Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/533

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souvenirs si noirs et de tels raffinements de cruauté, qu’ils restent dans notre cerveau comme un pénible cauchemar. Dans la seule guerre contre les Albigeois, il y eut plus de férocité qu’on ne pourra jamais en rencontrer dans les annales d’aucun peuple noir. Il n’y a personne à ignorer la perversité et le tempérament froidement sanguinaire d’un Simon de Montfort ou d’un Torquemada ; eh bien, les gens de leur espèce ne furent nullement des exceptions, à l’époque où ils ont vécu.

Pour ce qui s’agit des relations des Européens avec les hommes d’une autre race, avec les noirs surtout, il n’y a rien de plus affreux, rien de plus barbare. Toute l’histoire de la traite est maculée de pages sanglantes, ou les crimes de toutes sortes s’échelonnent avec tant de fréquence qu’on dirait les possesseurs d’esclaves en proie à une cruelle folie. Quelquefois c’est gratuitement, pour le plaisir de tuer que les Européens assassinent d’autres hommes qu’ils appellent des sauvages. « À Florida, dit M. de Quatrefages, une des îles Salomon, un brick vint s’arrêter à quelque distance de la côte. Un canot chargé de naturels s’en étant approché, une manœuvre en apparence accidentelle, le fit chavirer. Les chaloupes furent immédiatement mises à la mer comme pour porter secours aux naufragés. Mais les spectateurs placés sur les récifs ou sur d’autres canots, virent les matelots européens saisir ces malheureux, leur couper la tête avec un long couteau sur le plat-bord des chaloupes. L’œuvre accomplie, celles-ci retournèrent au brick qui prit immédiatement le large[1]. »

J’avoue que je n’ai jamais pu lire ce passage sans éprouver un profond sentiment d’horreur. En effet, devant de tels forfaits, il semble que l’esprit humain s’égare. On voudrait ne pas croire à la véracité de l’écrivain, on sent

  1. De Quatrefages, L’espèce humaine.