Page:Firmin - De l’égalité des races humaines.djvu/74

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une méthode d’incomparable clarté. Son nom reste impérissable dans les annales de la science. Il est certain que le progrès des études et la marche ascensionnelle des intelligences apporteront un coup mortel à toutes les déductions qu’il a cru pouvoir tirer de ces travaux anthropologiques. Ce que l’avenir saluera longtemps en lui, ce ne sera pas le grand craniologiste, ni l’ethnologiste brillant, mais systématique ; ce sera plutôt l’expérimentateur sagace qui, portant un dernier trait de lumière sur les études de Cullen et la découverte de Bouillaud, eut le bonheur de localiser définitivement la lésion organique d’où résulte l’aphasie, en circonscrivant le siège de cette affection dans la troisième circonvolution du lobe frontal gauche.

Eh bien, cet homme d’élite fut entraîné dans les discussions ardentes des monogénistes et des polygénistes par un simple hasard. Voici comment. Il s’agissait du métis du lièvre et de la lapine auquel l’illustre savant a donné le nom de léporide généralement adopté. Quand Broca eut vu pour la première fois cet animal produit par le croisement de deux espèces différentes, il en fut vivement frappé, d’autant plus que cette espèce mixte avait fait preuve d’une fécondité continue pendant sept générations. Après avoir pris toutes les précautions, afin de s’assurer qu’il était effectivement en face d’un cas d’hybridité, il résolut de présenter un de ces animaux, dont il se rendait deux fois parrain, à la Société de biologie qui existait alors. Il s’attendait à un succès incontestable. Mais il lui fut répondu que le fait paraissait impossible, puisqu’il était en contradiction avec la loi de l’espèce. Sans autre investigation, il fut donc conclu qu’il s’était trompé dans l’appréciation des caractères mixtes des léporides.

Tout cela est froidement raconté par le savant professeur lui-même ; cependant on peut y sentir encore, sous