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XLI
SOUVENIRS INTIMES

s’étaient éloignés. Les relations avec Maxime Du Camp n’étaient plus que fort rares ; dès 1852 les deux amis commencèrent à ne plus suivre les mêmes routes, leur correspondance le témoigne.

En amitié mon oncle était parfait, d’un dévouement absolu, fidèle, sans envie, plus heureux du succès d’un ami que du sien propre, mais il apportait dans ses relations amicales des exigences que parfois supportaient difficilement ceux qui en étaient l’objet. Le cœur auquel il s’était lié par un amour commun de l’art (et toutes ses liaisons profondes avaient cette base) devait lui appartenir sans réserve.

Lorsque, cinq ans avant de mourir, il recevait ce court billet en réponse à son envoi des Trois Contes :


« Cher ami, je te remercie de ton volume. Je ne t’en dis rien parce que je suis absolument abruti par la fin de mon travail. J’aurai terminé dans huit ou dix jours et je me récompenserai en te lisant. Tout à toi.

« Maxime Du Camp. »


son cœur souffrit et se replia amèrement. Où était l’ardent désir de connaître bien vite la pensée jaillie du cerveau de l’ami ? où étaient les belles années de jeunesse ? la foi l’un à l’autre ?

Cependant il y avait encore des natures qu’il affectionnait beaucoup. Parmi les jeunes, au premier rang, le neveu d’Alfred Le Poittevin, Guy de Maupassant, « son disciple », comme il aimait à l’appeler. Puis son amitié avec George Sand fut pour son esprit, et au moins autant pour son cœur, une grande douceur. Mais de sa génération proprement dite il ne lui restait qu’Edmond de Goncourt et Ivan Tourgueneff ; il goûtait avec eux la pleine jouissance des conversa-