En revenir à l’antique ; c’est déjà fait. Au moyen âge ; c’est déjà fait. Reste le présent. Mais la base tremble ; où donc appuyer les fondements ? La vitalité et partant la durée est à ce prix, pourtant. Tout cela m’inquiète tellement que j’en suis venu à ne plus aimer qu’on m’en parle. J’en suis irrité parfois comme un galérien libéré qui entend causer système pénitentiaire ; avec Maxime surtout, qui n’y va pas de main morte et qui n’est pas un gaillard encourageant ; et j’ai rudement besoin d’être encouragé. D’un autre côté, ma vanité n’est pas encore résignée à n’avoir que des prix d’encouragement.
Je m’en vais relire toute l’Iliade. Dans une quinzaine, nous ferons un petit voyage en Troade. Au mois de janvier nous serons en Grèce. Je bisque d’être si ignorant. Ah ! si je savais le grec au moins ! et j’y ai perdu tant de temps !
Celui qui, voyageant, conserve de soi la même estime qu’il avait dans son cabinet en se regardant tous les jours dans sa glace, est un bien grand homme, ou un bien robuste imbécile. Je ne sais pourquoi, mais je deviens très humble.
En passant devant Abydos j’ai beaucoup pensé à Byron[1]. C’est là son Orient, l’Orient turc, l’Orient du sabre recourbé, du costume albanais et de la fenêtre grillée donnant sur des flots bleus. J’aime mieux l’Orient cuit du Bédouin et du désert, les profondeurs vermeilles de l’Afrique, le crocodile, le chameau, la girafe.
- ↑ Allusion à la Fiancée d’Abydos, poème de lord Byron.