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CORRESPONDANCE

n’arrive pas encore. Ah ! ah ! mais je les casserais sur elle, tous ces petits braves compagnons-là, comme les commis voyageurs brisent sur leur front les assiettes d’auberge, par facétie.

Si je cherche un peu d’où vient mon bon état (présent), c’est peut-être à deux causes : 1o d’avoir vu l’autre jour ce brave garçon qui enfin parle notre langue ; on a plaisir à trouver des compatriotes dans la vie ; 2o à la société de Mme Vasse (tu sais, cette dame qui est ici). Elle a longtemps habité l’Orient. Nous en causons à table ; cela me ranime et me fait passer dans la tête de grands coups de vent qui m’emportent. Si fort que l’on ait l’orgueil de se croire, l’élément extérieur est bon quelquefois. Mais c’est si rare de trouver un lit pour ses fatigues ! Adieu, toi qui es l’édredon où mon cœur se pose et le pupitre commode où mon esprit s’entr’ouvre. Adieu encore, et mille toutes sortes de tendresses. À toi.


369. À LOUISE COLET.

En partie inédite.

[Croisset] Nuit de samedi, 1 h [5-6 mars 1853].

Nous causerons demain de l’Acropole. Parlons donc ce soir de nous et des autres. Et d’abord, quitte pour toujours ce système de travail hâtif, qui use la santé et la pensée. On gâche ainsi toutes ses forces nerveuses et intellectuelles. Habitue-toi à t’y prendre d’avance, à travailler plus lentement. Quand je me suis trouvé avec toi, lorsque tu faisais des corrections, tu ne saurais croire, bonne Muse, combien souvent tu m’irritais