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DE GUSTAVE FLAUBERT.

souvent de cancers à l’estomac. Cela peut être exagéré. Mais tout ce que je sais, c’est que mon père, qui était un maître homme dans son métier, préconisait fort la purée septembrale, comme disait ce vieux Rabelais. Sois sûre que dans un climat où l’on absorbe tant d’humidité, s’en fourrer toujours dans l’estomac, sans rien qui la corrige, est une mauvaise chose. Essaie pendant un mois de boire de l’eau rougie ou, si tu trouves ce mélange trop mauvais, bois à la fin de tes repas un verre de vin pur.

J’ai lu avant-hier, dans mon lit, presque tout un volume de l’Histoire de la Restauration de Lamartine (la bataille de Waterloo). Quel homme médiocre que ce Lamartine ! Il n’a pas compris la beauté de Napoléon décadent, cette rage de géant contre les myrmidons qui l’écrasent. Rien d’ému, rien d’élevé, rien de pittoresque. Même Alexandre Dumas eût été sublime à côté. Chateaubriand, plus injuste, ou plutôt plus injurieux, est bien au-dessus. À ce propos, quel misérable langage !

Pourquoi cette phrase de Rabelais me trotte-t-elle dans la tête, c’est comme les Barmessides : « L’Afrique apporte toujours quelque chose de nouveau » ? Je la trouve pleine d’autruches, de girafes, d’hippopotames, de nègres et de poudre d’or.

Adieu, mille bonnes tendresses. Mille bons baisers. À toi, à toi.

Ton G.

Point de lettre du Crocodile ? La dernière fois, il a été cinq semaines à nous répondre. En voilà 6 ou 7 !