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DE GUSTAVE FLAUBERT.

1825. À SA NIÈCE CAROLINE.
Vendredi, 3 heures, [14 mars 1879].
Ma chère Fille,

Il n’y a pas à hésiter. J’adopte la seconde combinaison. Je peux très bien vivre à Paris et n’y avoir pas de logement. Vous me réserverez, dans quelque coin, un lit ; voilà tout ce que je demande. Et quand j’aurai un peu d’argent, je me donnerai une petite vacance. Avec la maison de Croisset, 6 000 francs servis régulièrement, et ce que je pourrai décrocher d’autre part, l’existence sera possible.

J’ai tout lieu de croire qu’on va m’offrir une pension, et je l’accepterai, bien que j’en sois humilié jusqu’à la moelle des os (aussi je désire là-dessus le secret le plus absolu). Espérons que la presse ne s’en mêlera pas ! Ma conscience me reproche cette pension (que je n’ai méritée nullement, quoi qu’on dise). Parce que j’ai mal entendu mes intérêts, ce n’est pas une raison pour que la patrie me nourrisse ! Pour calmer ce scrupule, et vivre en paix avec moi-même, j’ai imaginé un moyen que je te communiquerai et que tu approuveras, j’en suis sûr, car tu es un honnête homme, chose plus rare qu’une honnête femme. Ma chère enfant ! ma pauvre fille !

Si cela se fait, comme je l’espère, je pourrai attendre la mort en paix.

Quand tu viendras ici, dans quinze jours, nous viderons à fond plusieurs petites questions secon-