Page:Flaubert - L’Éducation sentimentale éd. Conard.djvu/282

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duire des chauffages à la houille et au gaz. Le bourgeois s’enfonçait ; Sénécal appuya sur le mot. Bref, ses occupations lui déplaisaient ; et il somma presque Frédéric de parler en sa faveur, afin qu’on augmentât ses émoluments.

— Soyez tranquille ! dit l’autre.

Il ne rencontra personne dans l’escalier. Au premier étage, il avança la tête dans une pièce vide ; c’était le salon. Il appela très haut. On ne répondit pas ; sans doute, la cuisinière était sortie, la bonne aussi ; enfin, parvenu au second étage, il poussa une porte. Mme  Arnoux était seule, devant une armoire à glace. La ceinture de sa robe de chambre entr’ouverte pendait le long de ses hanches. Tout un côté de ses cheveux lui faisait un flot noir sur l’épaule droite ; et elle avait les deux bras levés, retenant d’une main son chignon, tandis que l’autre y enfonçait une épingle. Elle jeta un cri, et disparut.

Puis elle revint correctement habillée. Sa taille, ses yeux, le bruit de sa robe, tout l’enchanta. Frédéric se retenait pour ne pas la couvrir de baisers.

— Je vous demande pardon, dit-elle, mais je ne pouvais…

Il eut la hardiesse de l’interrompre :

— Cependant…, vous étiez très bien… tout à l’heure.

Elle trouva sans doute le compliment un peu grossier, car ses pommettes se colorèrent. Il craignait de l’avoir offensée. Elle reprit :

— Par quel bon hasard êtes-vous venu ?

Il ne sut que répondre ; et, après un petit ricanement qui lui donna le temps de réfléchir :

— Si je vous le disais, me croiriez-vous ?