Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/221

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[1]Arrivés enfin à Landévennec, nous entrâmes pour déposer nos sacs quelque part dans un cabaret plus que simple, où l’on s’asseyait sur les futailles en guise de bancs. Après y avoir bu un coup de mauvaise eau-de-vie dans un de ces grands gobelets du pays en faïence rayée de bandes roses et bleues comme une culotte de bal masqué, nous allâmes tout de suite voir l’abbaye.

Il n’en reste qu’un portail composé de trois arcades ; celle du milieu plus basse que les deux autres est seule percée. De chaque côté de l’une d’elles, après un contrefort, une longue petite fenêtre cintrée va s’évasant du dehors comme les meurtrières d’une forteresse ; en dedans de l’arcade du milieu, des colonnes courtes supportant des moulures ont des chapiteaux couverts d’entrelacs compliqués.

Quand on a franchi ce pan de muraille, soit par la brèche qui ouvre sur la cour, soit par le portail dont une échelle mise de travers vous barre l’entrée, apparaissent au fond les ruines du chœur et de l’abside découpant leur dentelure blanchâtre sur la couleur bleue du ciel. Elles forment un rond-point flanqué de chapelles latérales, rondes, garnies de contreforts extérieurs, avec des fenêtres à plein cintre la plupart soutenues par des colonnes qui s’engagent à leur base dans des piliers carrés. Le terrain de la cour ondule, fait des bosses et des creux ; c’est un mouve-

  1. Inédit, pages 221 à 224.