Page:Flaubert - Par les champs et par les grèves.djvu/369

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de balles, l’église a reçu des boulets, les obus ennemis ont été jusqu’à Behobie et y ont tué des hommes. Carlos est venu jusqu’aux bords de la Bidassoa, on montre la porte où il est entré la nuit pour visiter les siens et ranimer les courages.

À côté de la ville est un village moins misérable qu’elle, la Madalena. Il n’y a rien à y voir que des huttes de pêcheurs et sa belle plage qui descend mollement jusqu’à la mer. Devant l’église, il y a une petite fontaine dont les pierres sont disjointes, l’eau tombe goutte à goutte ; une petite fille et une vieille femme rousse attendaient, toutes deux assises sur le bord, que leur cruche fût remplie. L’église est basse, fraîche et sombre ; il y fait presque nuit, nous nous y sommes reposés sur de vieux bancs en chêne, la lampe de l’autel remuait agitée par le vent qui venait de la porte. Je n’oublierai pas le cortège d’enfants qui m’a entouré sur le rivage, alléché par l’espoir des aumônes ; les plus jeunes étaient les plus hardis, les aînés se tenaient au second rang, ordre qu’ils n’ont pas observé quand ma pluie de sous espagnols est tombée sur eux. Ils étaient tous en guenilles, tous timides et beaux, tous attendant l’argent en silence et ils se sont rués dessus quand il est venu. La marée n’était pas encore assez haute pour nous conduire facilement à Irun, ce qui fait que nous avons remonté lentement et péniblement la rivière.

J’ai quitté Fontarabie avec tout le regret d’une