Page:Flaubert - Salammbô.djvu/503

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Merci deux fois, et d’avoir écrit ce beau poème et de me l’avoir envoyé.

Tout à toi.

Leconte de Lisle.

Mon cher Confrère,
 
 

Salammbô après Madame Bovary me paraît le renversement du profond coup d’œil de Victor Hugo.

Hugo a compris que le roman historique était mort à jamais et que les plus belles qualités de formes et de couleur ne parviendraient pas à le raviver.

Vous avez tenté le contraire, et le public n’a pas vu quelles études patientes et réfléchies la construction d’un tel livre demandait : aussi vous avez pour défenseurs une partie des érudits nouveaux.

Salammbô était une fantaisie littéraire qui devait être tirée à cent exemplaires, comme un volume de poésies. Combien croyez-vous qu’il y a de catholiques qui lisent la Bible ? Les lecteurs qui dépassent les cent exemplaires sont des indifférents, des railleurs, des innocents, des niais, des ennemis. Vous avez même dû compter des impuissants, qui se fâchent en vilain et brutal langage du bruit qui s’est fait autour de votre œuvre.

Je vous ai exprimé sincèrement mon opinion, mon cher confrère ; mais de vos études et de votre persévérance dans l’accomplissement de ce vaste projet, il n’en reste pas moins une haute estime pour votre talent robuste, vos qualités ennemies de la vulgarité et votre personnalité. Et vous devez être honoré des honorables adversaires que Salammbô a fait descendre dans la lice.

Pardonnez-moi ma franchise et croyez-moi votre tout affectueux confrère.

Champfleury.
14 Septembre 1863.

Mon cher Ami,

Merci de votre envoi. J’avais lu votre livre, je l’ai relu, je suis encore plus ravi que la première fois. Ce qui m’a touché particulièrement, c’est la grandeur. Faire grand, cela est donné à bien