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faron, ne doutant de rien, pourfendant tout, en paroles, et aussi incapable de fermeté dans l’action que de persévérance dans une résolution courageuse.

Le mouvement tumultueux de la ville, mes nombreuses relations, mes conversations intimes avec mon oncle, Althaus et Emmanuel me donnaient une existence variée et assez occupée ; mais rien de tout cela n’intéressait mon cœur, et, dès lors, un vide affreux, une tristesse indicible s’emparèrent de moi. Les êtres d’une nature aimante ne sauraient vivre seulement de l’agitation que provoquent les événements extérieurs ; il leur faut des affections. Je reconnus, mais trop tard, que, poussée par le chagrin, j’avais cédé avec une imprudente facilité à mon imagination, en venant chercher au Pérou un calme, un bonheur que je pouvais seulement rencontrer au sein des douces émotions qu’il ne m’était plus permis de ressentir. Jeune encore, et passant pour demoiselle, j’aurais pu espérer d’être aimée d’un homme qui m’eût épousée, quoique privée de fortune. Je puis même dire, sans craindre un démenti, que plusieurs de ces messieurs d’Aréquipa m’ont assez manifesté leurs intentions pour que je sois sans aucun