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man. Un quart d’heure après, venait-il à passer un autre soldat criant : « Vive le général Nieto ! la victoire est à nous ; San-Roman est enfoncé ! » alors les assistants d’applaudir : les bons pères battaient dans leurs grosses mains, et s’écriaient : « Oh ! le brave général ! que de courage ! que de talent ! Damné soit ce misérable Indien, ce sambo de San-Roman ! » Mon oncle craignait d’être compromis par ces impertinents bavards, aussi ridicules que méprisables ; mais en vain employait-il toute son éloquence pour les faire taire, ses efforts étaient inutiles, tant il est dans la nature des gens de ce pays d’accabler sans mesure comme sans pitié celui qui tombe, pour louer avec exagération celui qui réussit.

Vers une heure du matin, Althaus nous envoya un de ses aides de camp pour nous informer que, depuis huit heures, l’action avait cessé ; que l’ennemi, intimidé par le nombre, n’avait osé s’aventurer, la nuit, dans des localités qu’il ne connaissait pas ; que nous avions déjà perdu trente ou quarante hommes au nombre desquels était un officier ; que la funeste méprise de Morant en était cause, et qu’un désordre alarmant régnait dans la troupe. Mon cousin me faisait re-