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— Croyez-vous que, s’ils étaient libres, leurs besoins ne suffiraient pas pour les porter au travail ?

— Les besoins, dans ces climats, se réduisent à si peu de chose, qu’il ne leur faudrait pas un grand labeur pour y pourvoir. Ensuite, je ne crois pas que l’homme, quels que soient ses besoins, puisse être amené à un travail habituel sans contrainte. Les peuplades d’indiens répandues sous toutes les latitudes de l’Amérique du nord et du sud offrent la preuve de mon assertion. Au Mexique, au Pérou, on a trouvé, il est vrai, quelques cultures parmi les indigènes ; encore voyons-nous la plupart de nos Indiens ne faire presque rien et vivre dans la misère et l’oisiveté ; mais, dans tout le vaste continent des deux Amériques, les tribus indépendantes vivent de la chasse, de la pêche et des fruits spontanés de la terre, sans que les fréquentes famines, auxquelles elles sont exposées puissent les déterminer à se livrer à la culture. La vue des jouissances que se procurent les blancs par leur travail, jouissances dont elles sont fort avides, est également sans influence pour les porter à travailler ; et ce n’est qu’au moyen de châtiments corporels que nos missionnaires sont parvenus