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XVI
essai

bâtit son nid, ou bien aussi mal que le moineau fait le sien.

«  Cependant je ne doute point que vous n’ayez lu, dans beaucoup de préfaces de fables, que « l’apologue est une instruction déguisée sous l’allégorie d’une action ; » définition qui, par parenthèse, peut convenir au poëme épique, à la comédie, au roman, et ne pourrait s’appliquer à plusieurs fables, comme celles de Philomèle et Progné, de l’Oiseau blessé d’une flèche, du Paon se plaignant à Junon, du Renard et du Buste, etc., qui proprement n’ont point d’action, et dont tout le sens est renfermé dans le seul mot de la fin : ou comme celles de l’Ivrogne et sa Femme, du Rieur et des Poissons, de Tircis et Amarante, du Testament expliqué par Ésope, qui n’ont que le mérite assez grand d’être parfaitement contées, et qu’on serait bien fâché de retrancher, quoiqu’elles n’aient point de morale. Ainsi cette définition, reçue de tous les temps, ne me paraît pas toujours juste.

« Vous avez lu sûrement encore, dans le très ingénieux discours que feu M. de La Motte a mis à la tête de ses fables, que, pour faire un bon apologue, il faut d’abord se proposer une vérité morale, la cacher sous l’allégorie d’une image qui ne pèche ni contre la justesse, ni contre l’unité, ni contre la nature ; amener ensuite des acteurs que l’on fera parler dans un style familier mais élégant, simple mais ingénieux, animé de ce qu’il y a de plus riant et plus gracieux, en distinguant bien les nuances du riant et du gracieux, du naturel et du naïf. »

« Tout cela est plein d’esprit, j’en conviens ; mais quand on saura toutes ces finesses, on sera tout au plus en état de prouver, comme l’a fait M. de La Motte, que la fable des deux Pigeons est une fable imparfaite, car elle pèche contre l’unité ; que celle du Lion amoureux est encore moins bonne, car l’image entière est vicieuse[1]. Mais pour le malheur des défi-

  1. Œuvres de la Motte, Discours sur la Fable, t. IX, p. 22 et suiv.