Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/12

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évidence avec beaucoup d’autorité des valeurs techniques naguère négligées et sans lesquelles il n’y aurait pas de statues ni de tableaux.

Notre art est, d’autre part, presque purement laïque, j’entends qu’il n’est pas conduit par une théologie et qu’il n’est pas sous la dépendance d’une église. Nous avons même de la peine à concevoir qu’il en ait jamais pu être ainsi, et c’est une originalité de l’archéologie contemporaine que d’avoir réussi à nous convaincre que les cathédrales du XIIIe siècle étaient des édifices véritablement religieux. Quelle que soit sa profondeur ou sa vivacité, le sentiment confessionnel n’intervient plus qu’exceptionnellement dans les arts, et comme un don particulier de poésie. Sans doute l’immense bagage des sujets pieux et des attributs liturgiques continue à inspirer et à documenter les sculpteurs ou les peintres, et l’on verra longtemps encore des Vierges et des Crucifixions exécutées avec plus ou moins de talent. Mais, s’il est permis de les classer encore par habitude dans l’art religieux, l’art religieux, au sens profond et canonique du mot, n’existe plus guère, et, quand il mérite vraiment ce nom, quand il est fait pour l’église, sur la commande de l’église et sous son inspiration directe, mérite-t-il encore d’être appelé un art ? En traitant les thèmes chers à l’art chrétien, la Renaissance y avait fait circuler le génie du paganisme et fait éclater la joie de vivre dans des épisodes destinés à propager l’humilité et le renoncement. Le dernier grand effort original de l’église dans les arts, le style jésuite, n’est pas seulement nuancé par