Page:Focillon - L’Art bouddhique.djvu/95

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reliefs. Rien d’étonnant, si l’on pense à l’essence de la doctrine, alors dans la plénitude de sa pureté, et qui répugnait à un culte personnel, à une idolâtrie de l’initiateur. Il était réservé à d’autres générations, à d’autres artistes, dans le nord-ouest de l’Inde, de concevoir et de réaliser le type du Bouddha, de le dégager de son obscurité symbolique, et, le revêtant d’une majesté plastique inconnue jusqu’alors en Asie, de doter vraiment l’humanité d’un dieu de plus.

Ce n’est guère qu’à partir de 1875 que les rapports de l’école du Gandhara avec l’art hellénique furent pleinement admis par les archéologues occidentaux. Encore aujourd’hui, cette vérité choque profondément les esthéticiens d’Extrême-Orient. « Une étude plus approfondie des œuvres du Gandhara, dit Okakura[1], révèle la prédominance des caractères chinois sur les prétendus caractères grecs. Le royaume de Bactriane, en Afghanistan, ne fut jamais qu’une petite colonie au milieu du grand empire tartare, déjà déchue dans les derniers siècles qui précédèrent l’ère chrétienne. L’invasion d’Alexandre signifie l’extension de l’influence persane plutôt que celle de la culture hellénique. » Mais M. Foucher ne fait appel ni à l’invasion d’Alexandre ni au royaume de Bactriane pour expliquer les caractères si manifestement méditerranéens des bas-reliefs du Gandhara. Dès le début de ses recherches, il s’était interdit toute spéculation d’histoire politique, militaire, économique, pour reporter son attention exclusive sur

  1. Op. cit., p. 87.