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DE LA SICILE.

fallait sauter de pointe en pointe, glisser, s’écorcher, se relever, en faire autant quelques pas plus loin ; enfin, tout en maudissant cette allure, on atteint la montagne de cendre. Ici commence un nouveau genre de supplice ; il faut monter presque perpendiculairement dans une cendre blanchâtre où vous enfoncez toujours jusqu’aux genoux. Cette cendre est semée de scories, de mâchefer, d’énormes pierres ponces enveloppées de soufre, auxquelles on cherche vainement à s’accrocher. Cet appui, qui n’a pas de racine, glisse et fait souvent perdre le terrain qu’on avait si péniblement gagné.

J’étais à peine à moitié chemin, et déjà le découragement s’emparait de moi. La raréfaction de l’air rendait la respiration difficile : plus tard, l’oppression devint extrême ; elle agit à tel point sur un de nos compagnons de voyage, qu’il s’évanouit. On le secourut, et, rappelant toutes nos forces, nous atteignîmes, au bout d’une heure et demie, la plus haute sommité du cratère. Je n’avais ressenti de ma vie une telle fatigue. De gros souliers, des gants épais, tout cela avait disparu ; j’arrivai sans chaussure, et les mains cruellement écorchées. Ma première