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SOUVENIRS

qu’on entend le soir après une journée douloureuse. Tant que l’âge n’aura pas glacé mon sang, je reviendrai toujours chercher les promontoires de l’Italie, sa mer d’azur et sa douce lumière. Quel plus noble passé que le sien ! Quoi de plus grand que son histoire ! Respectons jusqu’à son sommeil ; c’est celui qui succède à d’immenses travaux. Heureux celui dont la vie s’écoule doucement sur le rivage de Naples, en consultant ses ruines, en écoutant ses chants, en admirant ses arts !

On conçoit que le premier aspect de Rome ait fait dire à Montaigne : « J’ai vu ailleurs des maisons ruynées, et des statues, et du ciel, et de la terre ; et si pourtant ne sçaurois reveoir le tumbeau de cette ville si grande et si puissante, que je ne l’admire et revere. J’ai eu cognoissance des affaires de Rome long-temps avant que je l’aye eue de celles de ma maison : je sçavois le Capitole et son plan avant que je sçusse le Louvre, et le Tibre avant la Seine. J’ay eu plus en teste les conditions et fortunes de Lucullus, Metellus et Scipion, que d’aucuns hommes des nostres… Me trouvant inutile à ce siecle, je me rejecte à cet aultre ; et en suis