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LE RAJAH DE BEDNOURE,

j’avais vu des usages et de la recherche élégante des riches Européens. J’essayais de lui peindre avec une extrême réserve les mœurs des salons de Londres et de Paris ; je cherchais à lui donner une idée des efforts de l’esprit et du vide du cœur de tous ceux qui se fatiguent vainement pour plaire à des gens que rien n’amuse, pour étourdir un cercle dont la vengeance n’attend que leur départ. Après avoir passé en revue des ridicules qui l’amusèrent, des vices qui la surprirent, « Croyez-vous, me dit-elle un jour, que je n’aie pas aussi des choses intéressantes à vous apprendre ? Votre silence au sujet de ma famille, de notre établissement à Anjenga, ne peut pas naître de votre indifférence : n’en dois-je pas récompenser l’amitié la plus discrète, la plus réservée ? J’ai juré à mon père de ne révéler nos tristes aventures qu’à la personne qui veillerait sur ma conduite, sur mon bonheur à venir. C’est à ce titre que vous et M. Makinston méritez mon entière confiance. Vous connaîtrez jusqu’à ma plus chère et ma plus secrète pensée. Mon tuteur en est déjà instruit ; et, dès que vous le serez, cette malheureuse histoire ne sortira plus de ma bouche. »