Page:Forbin - Souvenirs de la Sicile.djvu/389

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
362
LE RAJAH DE BEDNOURE,

velle, fut serré de tristesse et en proie aux plus sombres pressentimens. Nous quittions ce lieu consacré par les cendres de ma mère, cette paisible vallée qui avait caché notre adversité : c’était dans la saison pluvieuse ; trois fois les torrens débordés nous forcèrent à regagner notre asile. Un passage étroit, recouvert par des arbres épineux et des lianes, en rendait la sortie presque impraticable. On souriait quand je faisais la remarque de tous les obstacles qui s’opposaient à notre départ et semblaient être des avis marqués de la destinée. Les images variées d’un avenir incertain plaisent bien plus à l’imagination des hommes que la perspective prévue et la paix d’une vie achevée dans la retraite. Ainsi l’écho est devenu muet autour du lieu où repose ma mère ; les fleurs qui couvraient son tombeau se seront flétries ; et, le jour où le juge suprême appellera toutes les générations dans les plaines d’Yémen, ma mère se levera et cherchera vainement autour d’elle les objets de ses éternelles affections.

» Console-toi, disait Misra : j’élèverai ici une pyramide sépulcrale ; j’y ferai bâtir une ville, et des jylongs, de nombreux pélerins, vien-