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culte apollinien et dionysien de la nature

    Mourir ainsi est la meilleure chose ; mais la seconde est celle-ci : mourir au combat et répandre une grande âme.


Zarathoustra parle en vrai disciple d’Odin. Assembler ses amis et leur donner le spectacle de sa mort volontaire, ou bien mourir en pleine mêlée comme un vieux Germain ou Gaulois, tel est l’idéal de Nietzsche.

    « Mais également haie par le combattant et par le victorieux est votre mort grimaçante, qui vient en rampant, comme un voleur, — et qui pourtant s’approche en maître.
    « Je vous fais l’éloge de ma mort, de la libre mort, qui me vient puisque je veux.
    « Et quand voudrai-je vouloir ? … »


Zarathoustra, dit-il, a un but et un héritier : le surhomme ; par respect pour le but et pour l’héritier, il ne veut pas suspendre des couronnes fanées dans le sanctuaire de la vie. Il ne veut pas ressembler aux cordiers, qui tirent leurs fils en longueur et vont eux-mêmes toujours en arrière. Quiconque veut de la gloire doit « prendre congé » et s’exercer à « l’art difficile de s’en aller au bon moment ». Il y en a chez qui le cœur vieillit d’abord ; chez d’autres, c’est l’esprit. Quelques-uns sont vieux dans leur jeunesse ; mais, quand on est jeune très tard, on reste jeune très longtemps.

    Il y en a beaucoup trop qui vivent, et trop longtemps ils restent suspendus à leur branche. Qu’une tempête vienne et secoue de l’arbre tout ce qui est pourri et mangé par le ver !
    Qu’il vienne des prédicateurs de la mort rapide ce seraient les vraies tempêtes et les vraies secousses sur l’arbre de la vie ! mais je n’entends prêcher que la mort lente et la patience avec
tout ce qui est terrestre.


Une bonne guerre, de belles hécatombes, voilà la tempête qui secouerait à propos l’arbre où pendent encore des fruits gâtés.

Que votre mort ne soit pas un blasphème des hommes et de la terre, mes amis ; c’est ce que je réclame du miel de votre âme.