Page:Fréchette - Poésies choisies, I, 1908.djvu/305

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Où la bise aux créneaux chante plus monotone,
De ses donjons, à l’heure où les sons familiers
De la cloche partout ferment les ateliers,
La haute citadelle, avec sa garde anglaise,
Entendit tout à coup tonner la Marseillaise,
Mêlée au bruit strident du fifre et du tambour...
Les voix montaient au loin ; c’était le vieux faubourg
Qui, grondant comme un flot que l’ouragan refoule,
Gagnait la haute ville, et se ruait en foule
Autour du consulat, où de la France en pleurs,
Drapeau toujours sacré, flottaient les trois couleurs.

Celui qui conduisait la marche, un gars au torse
D’Hercule antique, avait, sous sa rustique écorce,
― Comme un lion captif grandi sous les barreaux, ―
Je ne sais quel aspect farouche de héros.
C’était un forgeron à la rude encolure,
Un fort ; et rien qu’à voir sa calme et fière allure,
Et son mâle regard et son grand front serein,
On sentait battre là du cœur sous cet airain.