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Quelqu’un eût côtoyé la rive solitaire,
Il eût sans doute vu, furtifs, rasant la terre
Dans l’ombre de la berge, et pagayant sans bruit,
Trois longs canots glisser lentement dans la nuit.
C’étaient les Iroquois, ces maraudeurs sinistres,
Dont les premiers feuillets de nos anciens registres
Racontent si nombreux les exploits meurtriers.

Rendus non loin des lieux où nos expatriés
Avaient fortifié leur petite bourgade,
Dans un enfoncement propice à l’embuscade,
Ils prirent pied, masqués par un épais rideau
De branchages touffus inclinés à fleur d’eau ;
Puis sur le sable mou halèrent en silence
Leurs pirogues au fond le plus obscur de l’anse,
Et, sous les bois, guettant et rampant tour à tour
Tapis dans les fourrés, attendirent le jour.

Celui-ci se leva radieux et superbe.
C’est fête aux champs le jour de la première gerbe ;