Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/187

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précise l’endroit où les superstitieux pourraient le trouver sûrement.

Le diseur de bonne aventure est un solide vieillard, âgé de soixante-douze ans ; sur les quais, il est connu sous le nom de père Louis. Sa clientèle se recrute presque exclusivement parmi les ouvriers italiens, travaillant au déchargement des navires, et tout son attirail de sorcellerie tient dans un sac qu’il porte sur l’épaule.

Les séances se donnent soit dans quelques-uns de ces assommoirs, fabriques d’alcoolisés ; soit par terre, sur les quais, au milieu des tonneaux de vin.

Pour deux sous, on peut se payer une bonne aventure simple; pour quatre sous le père Louis a beaucoup plus de chances de dire vrai ; pour six sous, il ne se trompe jamais. Les prédictions se font à l’aide de cartes, d’une perruche verte et… d’un petit buste en plâtre de Racine.

Le père Louis, après avoir touché d’avance le prix du travail, prend des airs inspirés, lève les bras au ciel et prononce pendant une ou deux minutes des paroles inintelligibles. Soudain, il pousse un cri guttural, déploie un mouchoir blanc sur lequel sont tracés des carrés à l’encre rouge. Il place ses cartes, siffle la perruche qui vient se