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LES TROUVÈRES

La patrie de Boïeldieu est aussi la terre où la mélomanie a le plus fructifié. Il y a peu de villes où l’on aime autant la musique qu’à Rouen. Il faut que cet amour soit bien enraciné pour n’avoir pas été détruit par les concours monstres d’orphéons dont le bruyant souvenir tinte encore aux oreilles de nos concitoyens.

Les délicats ont pour eux les théâtres et les concerts — civils et militaires, — d’autres affichent une préférence marquée pour les beuglans, où font florès la Grosse Caisse sentimentale, la Main de ma Sœur et En r’venant de la Revue ; d’autres encore descendent de plusieurs échelons et vont le soir dans des bouges enfumés déguster une consommation aux refrains de quelque scie inepte.

Tous ces chanteurs, depuis le premier ténor de grand-opéra qui est payé quatre ou cinq mille francs par mois, jusqu’au baryton de la Brasserie des Décadens, qui gagne cinquante sous par jour, plus le blanchissage de deux chemises par semaine, sont des pensionnaires de l'établissement pour lequel ils travaillent. Ceux-là n’ont rien de particulier ; ils sont