Page:Fraigneau - Rouen Bizarre.djvu/222

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est un violoniste distingué ; on l’a vu, aux beaux jours du Théâtre-Lafayette, diriger l'orchestre ; on l'a applaudi parmi les musiciens du Théâtre-des-Arts. Il faisait à la fois pleurer son violon et rire la galerie.

Puis, l’amour de l’indépendance les a pris ; ils se sont faits trouvères ; ils ne doivent rien à personne, ils ne demandent rien à personne. Ils ont pour eux la grande liberté de la rue et les bravos d’un public spécial. Faut-il leur en faire un reproche ? Ils sont les premiers dans tout le quartier Martainville, ils n’auraient peut-être été que les seconds ailleurs…

Nous venons d’expliquer le trouvère ; que l’on n’aille pas, surtout, le confondre avec le chanteur des rues. Il existe entre ces deux catégories des différences profondes. Le chanteur des rues est un mendiant ; le trouvère est un artiste. L’un a toutes les humilités de son état, l’autre possède tout l’amour-propre de sa vocation et rien n’établit mieux la dissemblance des deux types que l’anecdote suivante :

Un haut fonctionnaire de département passe un jour au cours Boïeldieu et aperçoit sur un banc un malheureux violoneux auquel