Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/131

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Une autre fois, comme j’attachais au chevet de son lit une épingle noire, dont j’avais fait une espèce de porte-montre, le Roi me glissa dans la main un papier roulé. « Voilà de mes cheveux, me dit-il, c’est le seul présent que je puisse vous faire dans ce moment. »

Ombre à jamais chérie ! je le conserverai soigneusement, ce don précieux ! Héritage de mon fils il passera à mes descendants, et tous verront dans ce témoignage particulier des bontés de Louis XVI qu’ils eurent un père qui, par sa fidélité, mérita l’affection de son Roi !

Le Roi, je n’en peux douter, prévoyait que bientôt on viendrait m’arracher de la tour : cette idée le tourmentait. Des deux portes de la pièce dans laquelle je couchais, l’une donnait dans la chambre de Sa Majesté, l’autre sur l’escalier. Par cette dernière, souvent au milieu de la nuit, entraient brusquement des municipaux, pour voir si je n’étais pas occupé à des correspondances secrètes. Une nuit, entre autres, réveillé par le bruit qu’un municipal avait fait dans sa visite nocturne, le Roi conçut pour moi des inquiétudes. Dès la pointe du jour, Sa Majesté, pieds nus et en chemise, entr’ouvrit doucement la porte qui faisait communiquer sa chambre avec la mienne.