Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/150

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mouvement extraordinaire dans Paris. Ce que, peu de jours avant, un municipal m’avait dit en confiance sur des visites domiciliaires, des enlèvements d’armes, et de nombreux emprisonnements, revint à ma pensée. Mille conjectures sinistres occupaient mon esprit, lorsque soudain je vis deux commissaires, sortant du palais du Temple, s’avancer à grands pas vers la famille royale et la faire remonter aussitôt. Le Roi, accompagné de sa famille, étant entré dans la chambre de la Reine, parurent alors deux municipaux. L’un d’eux, nommé Mathieu, était un ex-capucin : de ma vie je n’oublierai le discours atroce qu’osa tenir à Sa Majesté le moine apostat.

« Monsieur, dit-il au Roi, vous ignorez ce qui se passe dans Paris. On bat la générale dans tous les quartiers, on a tiré le canon d’alarme, le peuple est en fureur et veut se venger. Ce n’était pas assez d’avoir fait assassiner nos frères le 10 août, d’avoir employé contre eux des balles mâchées dont on a ramassé des milliers dans les Tuileries ; c’est vous qui faites encore marcher contre nous un ennemi féroce qui menace de nous massacrer, d’égorger nos femmes et nos enfants. Notre mort est jurée, nous le savons ; mais, avant qu’elle nous atteigne, vous et votre famille périrez de la main