Page:François Hüe - Souvenirs du Baron Hüe publiés par le baron de Maricourt, 1903.djvu/275

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toutes les entraves qu’y apporta le gouvernement de Courlande qui, aussitôt après le départ du Roi, changeant de conduite et de langage, et sous le prétexte qu’une vente publique qu’il avait d’abord autorisée ne pouvait se faire dans le château de l’Empereur, menaça de faire saisir par la police le serviteur du Roi dépositaire des effets, s’il n’était parti à jour fixe et, arrêtant ainsi la vente, se fit adjuger à vil prix et, en les taxant lui-même, nombre d’objets à sa convenance.

Enfin, aux embarras cruels où jeta le refus de payement des cent mille roubles dans une situation où les dépenses du Roi étaient centuplées, se joignit la détresse affreuse de deux cent cinquante malheureux de tous rangs[1], de tout âge, de tout sexe qui n’avaient pu atteindre Memel qu’avec le secours des habitants du pays et auxquels le Roi, dont les bienfaits répandus sur l’émigration épuisaient annuellement les ressources, dut cependant

  1. D’anciens gardes du corps, des officiers français avaient été chassés de Russie en même temps que le comte de Provence. Réduits à la misère, ils s’échouèrent à Memel, où le Roi de Prusse leur fit signifier de ne point demeurer plus de vingt-quatre heures. Le Comte de Provence leur donna quelques subsides. Marie-Thérèse leur fit remettre cent ducats par le vicomte d’Agoult, sans vouloir que son nom fût prononcé.

    Il est curieux de constater que, six ans plus tard, le roi de Prusse, qui recevait si mal les émigrés dans son royaume, devait lui-même se retirer en proscrit à Memel, devant les armées de Napoléon.