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SOUVENIRS D’UN PAGE.

prétendu les journaux de l’anarchie, mais dans le costume décent avec lequel on se présentait à la cour où, certes, on n’aurait pas osé entrer autrement. Bien des personnes avaient des pistolets de poche, parce que, dans ces moments de troubles et de calamités, on était réduit à ne plus marcher sans cette précaution.

M. de La Fayette ayant dissipé le rassemblement de Vincennes et fait arrêter une soixantaine des plus mutins, revint, à la nuit tombante, aux Tuileries, où, disait-on, une armée de royalistes était réunie. Avec autant d’inutilité que d’imprudence, il y amena ses bataillons et son artillerie. On apprend qu’un individu, d’un nom obscur, avait voulu entrer chez la reine, que sous son habit on avait aperçu un stylet d’une forme extraordinaire, et qu’on l’avait arrêté. Le bruit se sème avec rapidité qu’une conspiration est tramée contre la sûreté du peuple, que le roi est entouré d’une association liberticide, nommée la Bande des chevaliers du poignard ; les têtes s’échauffent, et c’est prévenu de telles idées que La Fayette arrive au château avec son armée.

L’individu arrêté se nommait La Tombelle. Titulaire d’une charge obscure à la cour, peut-être son esprit exalté lui avait-il fait adopter ce genre d’arme défensive, ou peut-être était-il lui-même l’instrument du mouvement qu’on fomentait, quoiqu’on ait prétendu qu’il portait son poignard depuis longtemps. Toujours est-il qu’il ne fut plus question de cet individu, qui ne fut ni jugé ni justifié.