Page:Francisco de Miranda - Le général Miranda à la Représentation nationale, 1795.djvu/12

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tion, retranché du Peuple un individu après l’autre, preſſer les partiſans de cette maxime à mieux expliquer ce qu'ils entendent par le Corps de l'État, & vous verrez qu’ils le réduiront, à la fin, à un petit nombre d'hommes, qui ne ſont pas le Peuple, mais les Oficiers du Peuple, & qui s’étant obligés par un serment particulier à périr eux-mêmes pour ſon ſalut, prétendent par-la que c'eſt a lui de périr pour le leur. (Diſcours ſur l'economnie politique"

Cependant, quel étrange paradoxe ! & quelle contradiction barbare ! — que celui-la même, qui, depuis vingt ans, profeſſe publiquement la liberté ; qui, pour elle, a fait partout le ſacrifice des richesses & des dignités les plus propres a flatter l’orgueil & l'ambition des hommes ; qui n’a pas laiſſé un feul peuple libre ſur la terre, qu’il n’ait viſité, & avec qui il n’ait vécu quelque temps, conſultant les légiſlateurs & les ſages, pour s’inſtruire dans cette ſcience importante ; qui compte ſes amis parmis ces grands hommes, & ſes ennemis, chez les deſpotes ; qui eſt connu notoirement dans toute l'Europe & l’Amérique, pour un des plus chauds partiſans de la liberté ; qui, pourſuivi par le deſpotiſme eſpagnol, d’un pôle à l’autre, eſt venu en France, appelé pour y défendre cette liberté ſainte, & qui l’a, en eſſet, défendue de tout ſon pouvoir : — quelle inconcevable ſingularité, que ce même homme éprouve depuis vingt-deux mois la plus horrible perſécution, au ſein & au nom de cette nation même, pour laquelle il a combattu au péril de la vie, non-ſeulement, ſans que la calomnie ait pû produire pendant ce temps, une ſeule pièce a ſa charge, mais lorſqu’au contraire il en exiſte en ſa faveur un grand nombre des plus honorables[1]

  1. À l'époque du jugement des vingt-un députés, le comité de ſûreté générale ordonna la viſite de tous mes papiers, qui ſont chez le citoyen Barrois l’aîné, parmi leſquels ſe trouve un journal exact de ma vie depuis l'adoleſcence, ainſi que de mes voyages pendant douze ans, & dont la lecture ſeule ſuffiroit pour faire rougir la calomnie, & peindre le plus conſtant ainſi que le plus fidèle ami de la liberté.