Page:Francisco de Miranda - Le général Miranda à la Représentation nationale, 1795.djvu/8

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Mais je déclare que je ſuis trop dévoué au glorieux emploi de la combattre, pour ne pas être encore plus infatiguable qu’elle.

Je ſuis réſolu d’apprendre à l’Europe, ainſi qu’à l’Amérique, ſi j’aurai en France le privilège excluſif de la perſécution. Je veux voir ſi, après avoir été la première victime du ſystème tyrannique de Robeſpierre, j’aurai le bonheur d’en être la dernière, par les ſoins de ſes Diſciples ; & alors on verra du moins à quel point je ſuis éloigné d’avoir partagé les opinions atroces & tyranniques de ces infâmes ennemis de la liberté, & combien il étoit hors de mon pouvoir même d’y oppoſer la moindre réſiſtance.

Il y a maintenant quelque choſe de glorieux à être le ſeul homme ſuſpect en France, c’eſt-à-dire, le dernier réduit où la tyrannie ſe ſoit retranchée. Il eſt curieux de voir les acceptions differentes & contradictoires qu’on a données à ce mot ſuſpect à mon égard. — D’abord, & pour avoir un prétexte apparent à la perſécution, j’étois ſuspect de complicité avec Dumouriez. Enſuite, & lorsſqu’il eſt prouvé, qu’au lieu d’être ſon complice, j’étois ſa victime, je devins ſuſpect d’être républicain, mais non révolutionnaire (c’étoit au 31 mai). Peu après, je fus ſuſpect de fédéralisme : &, maintenant que cette dénomination ne peut plus ſervir de prétexte à l’oppreſſion, je ſuis ſuſpect de Capetiſme. Enfin, je n’aurois pas été ſurpris que ſi Robeſpierre & ſes complices euſſent ruiné la choſe publique, ainſi qu’il s’en eſt fallu de peu, on m’eût proſcrit comme ardent ami de la liberté : ce qui auroit été le ſeul ſoupçon légitime, & que je n’aurois jamais dénié.

J’avoue que cette deſtinée, à laquelle je ne devois pas m’attendre, me donne le courage de la ſupporter. Puiſ-qu’enfin on a la cruauté de ne pas vouloir me trouver