Page:Franck - Dictionnaire des sciences philosophiques, 1875.djvu/88

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de philosophie, 2 vol. in-8, Paris, 1824 ; — du Médiateur entre les extrêmes : lrc partie. Histoire el Politique, in-8, Berlin, 1828 ; 2epartie, Phi­losophie et Poésie, in-8, Berlin, 1831. Ch. B.

ANDALA (Ruard), né dans la Frise en 1665 ; et mort en 1727. Comme penseur, il est sans origi­nalité, et n’a aucune valeur dans l’histoire de la science ; mais il fut un des plus zélés défenseurs et des interprètes les plus éclairés de la philoso­phie cartésienne, qu’il essaya d’appliquer à la théologie. Voici les titres de ses principaux écrits : Exercitationes academicœ in philos, primam et naturalem, in quibus philos. Cartesii explicatur, confirmatur et vindicatur, in-4, Franeker, 1709.

  • Syntagma theologico —physico-methaphysi— cum, in-4, ibid., 1710. — Cartesius verus Spi— nozismi eversor et physicæ experimcntalis ar­chitectus, in-4, ibid., 1719. C’est la réfutation de l’ouvrage de Regius qui a pour titre : Cartesius verus Spinozismi architectus. — Andala est éga­lement l’auteur d’une Appréciation de la morale de Geulinx (Examen Elhicæ Geulinxii, in-4, 1716).

ANDRÉ (Yves-Marie) naquit à Châteaulin, en Basse Bretagne, le 22 mai 1675. Il fit ses études, y compris sa philosophie, à Quimper, avec un grand succès. Sa pieté naturelle, encore déve­loppée par les exemples de sa famille et un pen­chant décidé pour la retraite et les travaux de l’esprit, lui inspirèrent à dix-huit ans le désir de se vouer à la vie monastique. Il entra donc en 1693 chez les Jésuites, malgré les sages avertis­sements de quelques amis qui, connaissant son caractère et l’esprit de la célèbre compagnie, semblaient prévoir l’avenir. En effet, à peine eut— il pris l’habit religieux que commence la série des malheurs et des persécutions dont fut rem­plie la première partie de sa longue vie. Selon l’expression de M. Cousin, André s’était égaré chez les Jesuites. Son esprit était trop indépen­dant, son caractère trop ferme pour se plier à toutes les exigences de la Société. Enfin il est ordonné prêtre au commencement de 1706. C’est durant son séjour à Paris qu’il rencontra Male— branche, qui lui révéla la philosophie de Des­cartes comme le Traité de l’homme la lui avait révélée à lui-même. Dès lors André devint le plus sincère adepte de cette philosophie et le plus chaud ami de Malebranche. Les Jésuites, qui pro­clamaient le cartésianisme une doctrine aussi absurde qu’impie, aussi contraire à la foi qu’à la raison, éloignèrent au plus vite le jeune prêtre de Paris et de son illustre ami, et l’en­voyèrent pour y terminer sa théologie à la Flèche, malgré ses plaintes et ses réclamations portées hautement jusqu’à Rome auprès du Père géné­ral. De la Flèche, transporté à Rouen pour y achever son noviciat, puis au collège d’Hesdin, où il est chargé d’une basse classe, averti, amendé ou supposé tel, on lui confie enfin en 1709 la chaire de philosophie du collège d’Amiens, où l’on reconnut dans son enseignement l’influence de la doctrine de Malebranche, mais assez voilée pour qu’on se contentât d’exiger du professeur un écrit où il s’engageait à se prononcer à l’a­venir pour les doctrines de la Compagnie. On lui fit cependant quitter encore la chaire de phi­losophie d’Amiens pour celle de Rouen, dans la­quelle son enseignement parut d’abord si satis­faisant qu’on l’admit, en récompense, à la der­nière profession, qui le faisait décidément Jé­suite. Mais le cartésienne tarda pas à se montrer de nouveau, condamné à se rétracter publique­ment, il se soumit, mais la douleur dans l’âme. On fit du professeur incorrigible un père spi­rituel, que l’on envoya à Alençon en 1713. Un nouveau sujet d’épreuves l’y attendait. 11 con­damnait bien avec sa compagnie les cinq pro­positions déclarées hérétiques par la bulle uni­genitus, mais il ne pouvait ni approuver ni répéter les invectives et les calomnies dont les Jésuites accablaient les Jansénistes. Sa modé­ration parut de la froideur et sa charité une hostilité déguisée. Envoyé d’Alençon à Arras, d’Arras à Amiens, il est accusé dans cette ville d’être l’auteur d’une violente brochure contre les Jésuites. On fouille ses papiers et scs livres ; alors se révèle aux yeux de la compagnie indi­gnée le grand crime dont le révérend Père était bien réellement coupable. Une vie de Male— bran he, où le cartésianisme était donné comme la seule philosophie raisonnable et chrétienne, où les doctrines du corps, sa morale pratique, son personnel enfin étaient sévèrement jugés, se trouve, presque achevée, au nombre des ouvra­ges à la composition desquels le P. André con­sacrait ses loisirs. On ne peut plus s’y mépren­dre, c’est un faux frère ; c’est un serpent que la So iété porte dans son sein et qu’il est temps d’écraser. On le livre donc, sous un prétexte quelconque, à la justice du siècle, et il est, comme un criminel, enfermé à la Bastille. Là, à ce qu’il paraît, le cœur lui manqua. Effrayé de l’avenir dont il se voyait menacé, songeant sans doute à cet abbé Blache que des causes analogues avaient amené quelques années auparavant entre ces mêmes murs où il venait de mourir, il con­fesse ses torts et en demande parcîon à ses su­périeurs et à toute la compagnie dans une lettre qui attendrit probablement ses juges, car on le retrouve bientôt à Amiens, où il reprend ses fonc­tions un moment interrompues. D’Amiens enfin on l’envoie àCaen, en 1726, où il est chargé de la mathématique, comme on disait alors.

Là se fixe sa vie errante, et s’arrêtent les per­sécutions dont il avait été l’objet. Dans cette ville de calme et de silence, le P. André passe les trente-huit années qui lui restent, estimé de tous les personnages influents dont la haute so­ciété se compose. Son évêque, M. de Luynes, s’engige à le défendre envers et contre tous ; et le souvenir de la Bastille contient dans les limi tes qu’il s’est lui-même posées, et son cartésianisme et l’audace de ses jugements. Admis à l’Académie des sciences, arts et belles-lettres, il en devient un des membres les plus laborieux. Quelques-uns des écrits qu’il rédige pour ses séances répan­dent au loin sa réputation. Aussi tous les hommes de quelque valeur qui traversent la ville vien­nent lui rendre visite. On lui écrit de toutes parts pour prendre son avis sur différentes ques­tions de théologie, de littérature ou de science ; et si parmi les correspondants dont sa jeunesse dut être aussi heureuse que fière nous trouvons Malebranche, au nombre de ceux dont sa vieil­lesse s’honore nous comptons Fontenelle. Ce ne fut qu’en 1759, à quatre-vingt-quatre ans, que le courageux vieillard auquel ses supérieurs avaient souvent offert sa retraite, consentit enfin à quit­ter son enseignement et à prendre le repos que réclamait son grand âge. Lorsqu’en 1762 la compagnie de Jésus commença à se dissoudre ; le collège qu’elle dirigeait à Caen ayant été fermé, le P. André se retira, sur sa demande, chez les chanoines de l’Hôtel-Dieu, qui l’accueil­lirent avec respect, et le parlement de Rouen subvint généreusement à tous ses besoins. Il y mourut dans sa quatre-vingt-neuvième année* le 26 février 1764.Le