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EXTRAIT DE LA PRÉFACE

il en était de son travail avant d’y avoir renoncé, et tirer parti de ses lumières pour l’édition que j’étais bien décidé à donner au public.

Je me serais évité bien des fatigues si je me fusse adressé plus tôt à l’excellent M. Dacier. Je trouvai près de lui tous les renseignemens possibles sur mon historien favori. Tout me fut expliqué avec justesse et précision ; et j’appris non-seulement où il me fallait chercher mes matériaux, mais aussi où il était inutile de m’adresser. Ainsi tomba le prestige attaché aux deux plus beaux manuscrits de Froissait existans, celui de Breslau et celui de la Bibliothèque du Roi à Paris, tant vanté par Montfaucon. M. Dacier, qui les connaissait parfaitement tous les deux, ne les trouvait remarquables que par leur belle conservation, la richesse des ornemens et l’élégance de l’écriture. Quant à la correction et à l’exactitude du texte il les trouvait fort inférieurs à plusieurs autres manuscrits moins célèbres.

Une fois en possession de ces premières données, je devins plus exigeant. M. Dacier paraissait décidé à ne point mettre son travail au jour. Si l’important résultat de ses premières recherches lui faisait attacher quelque prix à son édition, les recherches assez nombreuses qui lui restaient à faire effrayaient son grand âge. Il redoutait ce nouvel embarras de la publication de plusieurs volumes in-folio ; car c’est sous ce format consacré qu’il avait commencé son édition. Il sentait que le gouvernement seul pouvait le mettre en état de terminer une semblable entreprise et il craignait de demander une faveur qu’il ne craignait pas moins d’obtenir. Mes sollicitations le décidèrent à s’en reposer sur l’activité de ma jeunesse d’un ouvrage aussi immense. Je connais l’époque où nous vivons et le besoin impatient de l’âge actuel de connaissances positives et sérieuses ; et j’avais la conviction parfaite que, pour l’exécution d’une entreprise aussi nationale que celle que j’avais en vue, je n’avais nullement besoin de la protection spéciale du gouvernement, protection qu’on paie d’ailleurs souvent trop cher.

M. Dacier voulut bien enfin m’autoriser à faire usage de ses nombreuses et savantes recherches. J’en donnerai dans cette préface un résumé exact afin que le public sache ce qu’il lui doit, et afin aussi qu’on ne lui attribue pas les erreurs que j’aurais pu commettre moi-même dans les recherches qu’il m’a fallu faire pour compléter celles du respectable académicien.

Lorsque M. Dacier entreprit son Froissart, voici quelles étaient les éditions que nous en avions en France.

1re  Édition. — Caractères gothiques, imprimée à Paris, sans date, chez Antoine Verard, trois volumes in-folio.

2e Édition. — Caractères gothiques, imprimée à Paris le 15 juillet 1505, chez Michel Le Noir, en deux volumes in-folio.

3e Édition. — Caractères gothiques, imprimée à Paris en 1530, chez Gaillot-Dupré, en trois volumes in-folio.

4e Édition. — Caractères romains, imprimée à Lyon en 1559, 1560, 1561, chez Jean de Tournes, en trois volumes in-folio. Cette édition a été revue et corrigée, c’est-à-dire tronquée, par Denys Sauvage.

5e Édition. — Caractères romains, imprimée à Paris en 1573, chez Michel Sonnius, en quatre volumes in-folio. Cette édition est une copie exacte de la quatrième.

6e Édition. — Caractères romains, imprimée à Paris en 1574, chez Gervais Maillot, en trois volumes in-folio. Cette édition est également une réimpression de la quatrième.

Le P. Le Long (Bibliothèque historique de France) mentionne de plus une édition de 1518, faite à Paris chez Verard et une autre faite aussi à Paris quelques années plus tôt, en 1513, avec une continuation jusqu’à cette même année.

On connaît en outre deux traductions anglaises de Froissart, l’une de Bourchier lord Berners, entreprise, comme je l’ai déjà dit dans cette préface, par l’ordre d’Henri VIII, imprimée en caractères gothiques à Londres par Richard Pinson, en 1525, format in-folio, réimprimée plus tard par W. Middleton et enfin republiée en 1812 sous les formats in-4o et in-8o ; l’autre de Johnes, imprimée dans son château d’Hafod, formats in-4o et in-8o, en 1803, ornée de plusieurs gravures d’après les dessins du manuscrit de la Bibliothèque du Roi de France, décrit par Montfaucon, avec un supplément publié en 1810.

Il y en a aussi une traduction en langue flamande de Guerrit Potters van der Loo, mais qui ne paraît pas avoir jamais été imprimée.

Sleidan et Belleforêt en ont fait un abrégé, l’un en latin publié plusieurs fois et traduit même en anglais par P. Golding, Londres 1608 ; l’autre en français, format in-16, imprimé à Paris en 1572 chez Hulpeau, sous le titre de Recueil diligent et profitable, auquel sont contenues les choses plus notables à remarquer dans toute l’histoire de Jean Froissart, mis en un abrégé et illustré de plusieurs annotations par Frédéric de Belleforêt.

On trouve également quelques chapitres extraits de Froissart dans un ouvrage in-folio intitulé La mer des histoires. Les historiens ne se faisaient alors aucun scrupule de se copier réciproquement et