Page:Froissart - Les Chroniques de Sire Jean Froissart, revues par Buchon, Tome III, 1835.djvu/387

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
381
DE LA PREMIÈRE ÉDITION.

I. Manuscrit de la bibliothèque de M. le prince de Soubise, in-folio sur vélin à deux colonnes, écriture de la fin du quatorzième siècle ou du commencement du quinzième, relié en bois couvert de velours violet, la couverture garnie aux quatre coins de coquilles de cuivre doré avec une cinquième coquille au milieu. On lit ces mots en dedans de la couverture : Ce manuscrit échappé du château du Verger a été envoyé par M. Marchand de la part de M. le prince de Rohan pour la bibliothèque de M. le prince de Soubise. Ce 21 avril 1779. Le lieu où il a été trouvé et les coquilles dont la couverture est ornée prouvent indubitablement qu’il appartenoit au maréchal de Gyé.

Ce manuscrit contient le premier volume entier de Froissart et est composé de 417 feuillets non chiffrés. Le premier est orné d’une miniature divisée en deux tableaux. Dans l’un on voit Froissart qui présente a genoux son ouvrage au roi Charles V assis sur son trône. On reconnaît ce prince, parce qu’on voit Du Guesclin dans un coin du tableau, tenant en main l’épée de connétable et vêtu d’une tunique chargée de l’écusson de ses armes. L’autre tableau représente le roi d’Angleterre assis pareillement sur son trône, entouré de ses officiers et ayant l’air de parler à un homme vêtu d’une robe bleue, qui l’aborde à genoux. Je ne puis deviner ni quel est ce roi, ni quelle est l’action que l’artiste a voulu peindre.

Cette miniature est la seule dont ce manuscrit soit orné : l’écriture en est parfaitement belle et bien soignée : les titres des chapitres sont en rouge ; le premier est conçu ainsi :

« Cy commencent les Croniques de France et d’Angleterre, commencées par discrete personne Mons. Jehan Le Bel chanoine de Saint-Lambert du Liege et continuées jusques à la bataille de Poitiers ; et après sa mort furent compilées et arfaites par venerable homme Mons. Jean Froissart ; ès quelles Croniques sont contenues plusieurs nobles avenues et beaux faiz d’armes qui advinrent tant en France, en Angleterre, en Espaigne, en Escoce et en Guienne comme ou pays de Bretaingne et ailleurs. »

La complaisance avec laquelle le copiste vante la bravoure des chevaliers bretons, dont il nomme souvent un beaucoup plus grand nombre qu’on n’en trouve dans les autres manuscrits, ne permet pas de douter, ou qu’il ne fût lui-même Breton, ou qu’il ne travaillât pour quelque seigneur de cette province. Quoi qu’il en soit, ce manuscrit est un des meilleurs et des plus corrects que j’aie vus : il fournit toutes les bonnes leçons et entre autres celle qui attribue à Pépin des Essarts et à Jean de Charni, à l’exclusion de Jean Maillart, l’honneur d’avoir délivré Paris de la tyrannie du prévôt Marcel.

II. Autre manuscrit de la même bibliothèque, in-folio, sur vélin à deux colonnes, caractères gothiques qui paraissent être du même temps que le précédent, relié en bois couvert d’une grosse panne jadis violette. En dehors de la couverture, sur une bande de parchemin encadrée d’un petit galon d’or usé et recouverte d’un morceau de corne transparente est écrit : Le premier volume de Froissart.

Sur le verso d’un feuillet de parchemin qui précède le texte est un écusson palé d’argent et de gueule de six pièces, ayant pour support deux sauvages. Ce manuscrit n’est orné d’aucune miniature ; la moitié de la première page, où le copiste comptait vraisemblablement en placer une, est restée vide. On n’y trouve aucun titre de chapitre, pas même le titre général de l’ouvrage, mais le commencement de chaque chapitre est marqué par une lettre grise, et la division est à peu près la même que dans le manuscrit précédent. Le prologue et les premiers chapitres jusqu’à celui qui commence ainsi : Adonc s’espandirent nouvelles de sa venue (de la reine d’Angleterre) par le pays, etc., ont été abrégés par le copiste, qui s’est même permis quelquefois de déranger l’ordre des événemens. Le reste du manuscrit est assez correct et fournit de bonnes leçons. Il contient à peu près le tiers du premier volume de Froissart et finit avant le récit de la bataille de Crécy, à ces mots du chapitre 287, vous devez savoir que ces seigneurs, roys, ducs, contes et barons françois ne vindrent mie jusques là tous ensemble, etc.

III. No 6760. Manuscrit de la Bibliothèque du Roi, très gros volume in-folio en vélin, écriture qui paraît être du quinzième siècle.

On voit à la tête une assez belle miniature qui représente un combat. Dans le coin gauche du grand tableau, le peintre en a fait un autre qui n’a nul rapport avec la première, dont elle est séparée par une bordure. Ce second tableau représente une chambre ornée d’un dais sous lequel Froissart, en habit ecclésiastique, et assis une plume à la main devant un pupitre, paraît occupé à écrire son histoire. On voit sur un coffre auprès de lui son aumusse et son surplis. On avait eu le projet d’orner ce manuscrit d’un grand nombre de miniatures ; mais elles n’ont point été exécutées, et les places sont restées vides.

Ce manuscrit ne contient que le premier des quatre livres de Froissart, et ce livre y est divisé en quatre parties.

Les titres et les divisions des chapitres diffèrent souvent des imprimés.

J’ai dit que ce manuscrit ne contenait que le premier livre de Froissart et qu’il y était divisé en