Dampmartin de monseigneur Regnault de Cobehen, Là eut adoncques trop grand’presse et trop grand boutis sur le roi Jean, pour la convoitise de le prendre ; et le crioient ceux qui le connoissoient, et qui le plus près de lui étoient : « Rendez-vous, rendez-vous, autrement vous êtes mort. » Là avoit un chevalier de la nation de Saint-Omer, que on appeloit monseigneur Denis de Mortbeque, et avoit depuis cinq ans servi les Anglois, pour tant que il avoit de sa jeunesse forfait le royaume de France par guerre d’amis et d’un homicide qu’il avoit fait à Saint-Omer, et étoit retenu du roi d’Angleterre aux sols et aux gages. Si chéy adoncques si bien à point au dit chevalier que il étoit de-lez le roi de France et le plus prochain qui y fut, quand on tiroit ainsi à le prendre : si se avance en la presse, à la force des bras et du corps, car il étoit grand et fort, et dit au roi, en bon François, où le roi se arrêta plus que à autres : « Sire, sire, rendez-vous. » Le roi qui se vit en dur parti et trop efforcé de ses ennemis, et aussi que la défense ne lui valoit rien, demanda en regardant le chevalier : « À qui me rendrai-je ? à qui ? Où est mon cousin le prince de Galles ? Si je le véois, je parlerois. » — « Sire, répondit messire Denis, il n’est pas ci ; mais rendez-vous à moi, je vous menerai devers lui. » — « Qui êtes-vous, » dit le roi ? « Sire, je suis Denis de Mortbeque, un chevalier d’Artois ; mais je sers le roi
Plusieurs autres corps occis à la dite bataille, par la licence de l’official de Poictiers et du maire de la dite ville, furent amennez en charetes par les dicts frères mineurs en icelle ville de Poictiers et enterrés en de grands fousses en leur cimétiére qui est hors l’église, le jour de Sainct Valentin ou dict au mil trois cent cinquante et six, et furent faictes obseques honnorables par toutes les églises, couvens et monasteres aux despens des bons bourgeois d’icelle dicte ville.
Ce sont les noms de ceulx qui furent enterrés en l’église des frères preseheurs du dict Poictiers, que j’ay prins et extraits du livre qu’on appelle le kalendaire du dict convent et traduicts de latin en françois.
Le duc de Bourbon de la partie dextre du grand aullier.
Le mareschal de Clermont aussi de l’autre couste.
Au dessoudz près de luy messire Aubert de Angest.
Après lui le vicomte de Rochechouart.
Du milieu du cueur Aymer de la Roche-Foucault.
À l’entrée du cuœur à main dextre messire Jean de Sanserres.
En la chapelle de Magdalaine messire Jehan de Saint-Digier.
En la dicte chapelle près du mur de Thiebault de Laval.
En la chapelle des Apoulstres près du mur messire Thomas de Motur.
En la chapelle de Nostre Dame messire Gaultier de Montagu.
Après luy messire Raoul Rabinard.
En la nef près de la porte messire Jehan Ferchaut.
Près de luy messire Pierre Marchadier et Héliot son frère.
Davant l’ymage Sainct Michel messire Olivier de Monville.
De l’austre couste messire Phelipes de Forges.
Davant (a grant porte mesure Guillaume de Bar et messire
Jehan de Nully.
Ceulx qui sont ès cloistre du dit convent.
Le chevalier Miloton. |
Messire Jehan la Garde. |
En trois fousses, huyt dont on ne scet les noms et surnoms ; et y avoit le corps d’un chevalier qui portoit ung chevron d’or. Et de tous les princes chevaliers et seigneurs dessus nommez les armes furent painctes afin de perpetuelle mémoire ès sieges des dictz convens. Froissart a escript que la dicte bataille fut le vingt-deuxième jour de septembre l’an mil trois cent cinquante et sept ; mais par ces dictz extraictz qui sont véritables, appert que ce fut le lundi dix-neufviesme jour du dict moys de septembre l’an mil trois cent cinquante et six.
* Le duc d’Athènes avait été pourvu de la charge de connétable le 6 mai de cette année : ainsi ces deux personnages n’en font qu’un.
** Les deux ne font qu’un : Jacques de Bourbon était comte de Ponthieu.