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[1385]
CHRONIQUES DE J. FROISSART.

François ; car leur guerre est plus belle sur les François que elle n’est sur les Anglois. C’est l’une des principales incidences qui les y incline plus.

CHAPITRE XXV.

Comment le roi de Chypre fut tué et meurtri en son lit par son propre frère, par l’enortement des mescréans pour la bonté et la hardiesse qui étoit au roi.


En ce temps vinrent autres nouvelles en France, car le roi Lyon d’Arménie y vint[1], non pas en trop grand arroi, mais ainsi comme un roi échassé et bouté hors de son pays, car tout le royaume d’Arménie dont il se nommoit étoit

  1. Léon VI, roi d’Arménie, de la famille des Lusignan de Chypre, nommé roi en 1365. Il fut le dernier roi chrétien d’Arménie. Le soudan d’Égypte le fit prisonnier, ainsi que sa femme, sa fille et son général Schahan, prince de Gorhigos, dans la forteresse de Gaban, où ils s’étaient retirés. Ils furent tous conduits prisonniers au Caire, où le roi d’Arménie perdit sa femme et sa fille : mais, après six ans de captivité en 1381, il fut remis en liberté par le soudan, sur les instantes prières du roi Jean Ier de Castille. Léon s’embarqua avec les ambassadeurs de Jean Ier de Castille, et se rendit près du pape Clément VII à Avignon, et de là en Castille où il arriva en 1383. Le roi Jean lui rendit les plus grands honneurs et lui fit don, sa vie durant, des seigneuries de Madrid, de Villa-Réal et d’Andujar. Le conseil municipal de Madrid lui envoya des commissaires pour lui rendre hommage, le 2 octobre 1383 ; et on a un acte daté de Ségovie, le 19 octobre, et signé Léon roi d’Arménie, qui confirme à la ville ses fors et priviléges. Le roi Léon VI passa ensuite en France en 1385. En 1386, pour établir la paix entre la France et l’Angleterre, il se rendit auprès de Richard II, à Londres. On trouve dans Rymer, aux années 1385 et 1386, plusieurs actes relatifs à ce prince : tels sont entr’autres les trois actes suivans, qui précédèrent son arrivée :

    I. Pro magistro hospitii Leonis regis Armeniæ, et pro ipso rege.

    Rex universis et singulis admirallis, etc., ad quos, etc., salutem :

    Volentes pro securitate Johannis de Rusp, magistri hospitii magnifici principes Leonis regis Armeniæ, qui in regnum nostrum Angliæ, pro providentiis et negotiis ipsius regis faciendis, de licentia nostra est venturus, specialiter providere.

    Suscepimus ipsum Johannem, cum quinque hominibus et sex equis, quatuor arcubus et viginti et quatuor sagittis barbatis, ac aliis rebus et hernesiis suis quibuscumque, in regnum nostrum Angliæ, per dominium et potestatem nostram, tam per terram, quam per mare, veniendo, ibidem morando, et exinde ad propria libere redeundo, in salvum et securum conductum nostrum, ac in protectionem et defensionem nostras ; suscipimus et ponimus speciales et ideo vobis et cuilibet vestrum injungendo mandamus quod, etc., prout in ejus modi de conductu literis.

    In cujus, etc., per dimidium annum duraturas.

    Teste rege apud Westmonasterium, vicesimo quarto die octobris.

    Per ipsum regem et concilium.

    II. Rex eisdem, salutem :

    Sciatis quod

    Cum magnificus princeps, Leo rex Armeniæ, in regnum nostrum Angliæ, de licentia nostra regia, sit venturus,

    Nos, ut idem rex adventum et reditum, juxta desiderium suum, prosperos optineat et securos, ipsum regem, cum vassallis, hominibus servientibus et familiaribus suis, cujuscumque gradus fuerint, ac quadraginta equis, nec non bonis et hernesiis suis quibuscumque, in regnum nostrum Angliæ, etc., ut supra usque ibi, injungendo man damus, et tunc sic :

    Quod eisdem, regi Armeniæ, aut vassallis, hominibus, servientibus, vel familiaribus suis, cujuscumque gradus fuerint, in regnum nostrum prædictum, etc., ut supra.

    In cujus, etc. per dimidium annum duraturas, teste ut supra.

    Per ipsum regem et concilium.

    III. De vino pro expensis præfati regis hospitii.

    Rex universis et singulis admirallis, etc., salutem :

    Sciatis quod

    Cum Johannes Rusp, magister hospitii magnifici principes Leonis regis Armeniæ, centum et quinquaginta couples vini Franciæ, pro expensis hospitii ipsius regis Armeniæ, qui in regnum nostrum Angliæ est venturus, per servientes et attornatos suos, mediante licentia nostra ducere proponat,

    Nos,

    Ne idem Joannes, vel dicti servientes et attornati sui, forte, per aliquos ligeorum nostrorum, in præmissis aliqualiter perturbentur,

    Volentes eorum securitati in hac parte specialiter providere,

    Suscepimus ipsum Johannem, ac servientes et attornatos suos, cum vino prædicto, ac navibus et vasis vinum illud continentibus, in regnum nostrum Angliæ, per dominium et protestatem nostram, tam per terram, quam per mare, ex causa prædicta veniendo, ibidem morando, et exinde ad propria redeundo, in salvum et securum conductum nostrum, ac in protectionem et defensionem nostras speciales.

    Et ideo, etc., ut in ceteris de conductu literis.

    In cujus, etc., usque ad festum paschæ proximo futurum duraturas.

    Teste rege apud Westmonasterium, vicesimo octavo die octobris.

    Per billam de privato sigillo.

    Les négociations du roi d’Arménie paraissent avoir eu quelque effet pour calmer la haine des deux adversaires, puisque nous trouvons à l’année 1386, dans Rymer, un plein pouvoir donné à la requête du roi d’Arménie pour traiter de la paix. Nous ne citerons que le commencement de cet acte.

    IV. De tractando cum adversario Franciæ, ad requestum regis Armeniæ.

    Le roy a touz ceux qi cestes lettres yerront ou orront, salutz.

    Savoir faisons que nous,