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DE SIRE JEAN FROISSART.

Des paroles que le chevalier me contoit étois-je tout réjoui, car elles me venoient grandement à plaisance, et toutes trop bien les retenois ; et sitôt que aux hôtels sur le chemin que nous faisions ensemble descendu étois, je les escripsois, fut de soir ou de matin, pour en avoir mieux la mémoire au temps avenir, car il n’est si juste retentive que c’est d’escripture.

(T. ii, p. 394.)


Et vous dis acertes que, pour faire ces chroniques, je fus en mon temps moult par le monde, tant pour ma plaisance accomplir et voir les merveilles de ce monde, comme pour enquérir les aventures et les armes, les quelles sont escriptes en ce livre.

(T. ii, p. 458.)


De toutes leurs accointances ne me vueil-je pas trop ensoigner de parler, car je n’y fus pas : je ne le sais, fors par le gentil chevalier messire Jean Ferrant Perceke (Pacheco) qui y fut et qui m’en informa.

(T. ii, p. 561.)


Si je disois : ainsi et ainsi en advint en ce temps, sans ouvrir ni éclaircir la matière, qui fut grande et grosse et horrible, et bien taillée de aller malement, ce seroit chronique et non pas histoire, et si m’en passerois bien si je voulois.

(T. ii, p. 579.)


Qu’on ne dise pas que j’aie la noble histoire corrompue par la faveur que je ai eue au comte Guy de Blois qui la me fit faire et qui bien m’en a payé tant que je m’en contente, pour ce que il fut nepveu et si prochain que fils au comte Louis de Blois, frère germain à saint Charles de Blois, qui tant qu’il vesquit fut duc de Bretagne ! Nennil vraiment ; car je ne vueil parler fors que de vérité, et aller parmi le tranchant sans colorer l’un ni l’autre ; et aussi le gentil sire et comte, qui l’histoire me fit mettre sus et édifier, ne le voulsist point que je la fisse autrement que vraie.

(T. ii, p. 579.)


Et ouïs pour certain recorder à un chevalier d’Angleterre à qui j’en parlai (de la peste de 1387) sur son retour qu’il fit parmi France, et qui s’appeloit messire Thomas Quinebury, que de quinze cens hommes d’armes et bien quatre mille archers que le duc de Lancastre avoit mis hors d’Angleterre, il n’en retourna oncques plus de la moitié, si moins non.

(T. ii, p. 637.)


Il me fut dit au pays même (en Auvergne), qu’ils eurent (les routiers) de profit en ce voyage la valeur de cent mille francs en leurs prisonmers.

(T. ii, p. 676.)


Et vous dis que en ce parti d’armes là, les Anglois trouvèrent les Escots moult courtois et légers et débonnaires en leurs délivrances et rançons, tant que ils s’en contentèrent, ainsi que me dit, au pays de Béarn, en l’hôtel du comte de Foix, Jean de Chastel Morant qui pris y avoit été dessous la bannière du comte de la Marche et de Dunbar.

(T. ii, p. 738.)


Et je, Jean Froissart, auteur de ces chroniques, pourtant que oncques en Affrique ne fus ni avois été au jour que je m’en laissai informer par les dits chevaliers et écuyers qui au dit voyage furent, à la fin que plus justement en pusse escripre, leur demandai la façon, la manière et la grandeur. Et pour ce que moult de fois en mon temps je fus en la ville de Calais, ceux qui m’en éclaircirent la vérité, et qui aussi en la ville de Calais avoient été, le me signifièrent au plus près qu’ils purent, par aucune manière, non pas de toutes, à la forte ville de Calais ; et me dirent que de forme elle est en manière d’un arc.

(T. iii, p. 81.)


Toutefois je, Jean Froissart, auteur de celle histoire, une fois que j’étois à Paris, et en ce temps que un grand meschef fut près à venir par nuit sur le corps messire Olivier de Cliçon, connétable de France, et par l’outrageuse et merveilleuse emprise de messire Pierre de Craon, si comme je vous recorderai et éclaircirai avant en l’histoire quand temps et lieu sera, pour ce que je véois les choses obscures et en grand trouble, et moult bien taillées de mal aller, mis grand’peine à ce que je pusse savoir l’introduction de celle matière, et pourquoi messire Pierre de Craon étoit et avoit soudainement été éloigné de la grâce, amour et faveur du roi de France et du duc de Touraine. Tant enquis et demandai à ceux qui en cuidoient et devoient savoir aucune chose, que on me dit la