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l’homme à l’hispano

poitrines courbées faisaient quelques pas qui les prolongeaient. Ils aspiraient la douceur de l’air, et leur espoir de durer se voyait dans leurs yeux avides. Leurs visages creux montraient encore leur plaisir d’exister. Une vie diminuée, au ralenti, les animait et, dans la splendeur immense de cette coupe, ils ne songeaient qu’à l’énergie nouvelle qu’ils y pouvaient puiser pour économiser les leurs.

— Ils ne veulent pas mourir, pensa Dewalter avec mépris.

Mais il se rendait compte qu’il leur ressemblait et que, dans ce bel après-midi, il était pareil à ces exténués.

Il hâta le pas et il se dirigea vers le château. Il foulait une large allée qui s’enfonçait dans un sous-bois. Au bas des arbres dépouillés, il traversait, sur le sol, des petits étangs de lumière. Une odeur moisie rampait sous les branches arides ; les toits de la basse ville s’obscurcissaient. Les ardoises devenaient bleues, puis grises, et soudain le soir frissonna.

Georges reprit sa marche, en sens inverse, jusqu’à une église qui bourdonnait dans le crépuscule entre les deux grands hôtels de la ville. Il y entra. Incapable de prier, il songeait.

Enfin, il entendit sonner cinq heures. Il rejoignit Stéphane, qui l’attendait depuis quelques instants dans sa voiture, à deux pas, devant un petit thé qu’ils avaient choisi comme point de ralliement.