A.
Premiere lettre de l’Alphabet François, & de toutes les autres Langues. Chez les Occidentaux cette lettre prend son nom de l’expression du son qu’elle fait. Chez les Grecs on la nomme Alpha chez les Hebreux, Aleph ; chez les Pheniciens Alioz & chez les Indiens, Alepha. C’est aussi le premier son articulé que la Nature pousse, & celuy qui forme le premier cri & le begayement des enfans. D’oû vient que Jeremie répondant à Dieu qui le destinoit pour son Prophete luy dit A, a, a, Seigneur je ne sçay pas parler, parce que je suis un enfant. Hieram. cap. i.
C’est aussi ce qui exprime presque tous les mouvemens de nostre ame, & pour rendre l’expression plus forte, on y ajoûte une h devant ou après, comme dans l’admiration : Ha le beau tableau ! Dans la joye : Ha quel plaisir ! Dans la colere : Ha méchant ! Dans la douleur : Ha la teste ! Dans la pamsmoison : Ha je me meurs ! Dans le mouvement : Halevrier ! Et generalement ce mot exprime toutes les palpitations de cœur, comme il paroist en ceux qui ont la courte haleine. Ciceron appelle l’A lettre salutaire, parce que c’estoit la marque d’absolution.
Cette lettre forme souvent un mot entier, & est quelquefois article du Datif pour decliner les noms et les pronoms : Ce livre est à Pierre, à Agnés. Quand il sert à decliner des noms ordinaires, s’ils commencent par des consones, on dit au, comme Au soleil : si c’est par une voyelle, on y ajoute une l au masculin, ou la au feminin : A l’homme, A la femme ; Et au pluriel on dit en tous cas, aux comme : Aux Alexandre, Aux Muses, Aux Animmaux.
A est quelquefois preposition : Il est à la ville, aux champs : Cela est à la mode.
A est le plus souvent adverbe, non seulement de temps et de lieu, comme, Cela vient à tard. Cela est à terre : mais encore il se joint à presque tous les mots de la Langue pour faire des phrases adverbiales qui tiennent de leurs significations & de leurs manieres : Venir à chef, Estre à couvert, à dicretion, &c.
A se joint aussi aux infinitifs des verbes pour faire des phrases adverbiales : Donner à boire & à manger : Un maistre à écrire : On fait à sçavoir : Au pis allez.
A se dit aussi dans les temps du verbe auxiliaire Avoir : Il a gagné cent écus : Il a fait : Il a dit : Il a le temps & l’argent.
A est souvent une particule indéclinable qui sert à la composition de plusieurs mots, & qui augmente, diminuë ou change leur signification. Quand elle s’y joint, elle fait doubler ordinairement la consone qu’ils ont à la teste, comme Accorder, Addonner, Affaire, Assujettir, Attrouper, &c.
Cette lettre A estoit aussi chez les Anciens une lettre numérale, qui signifioit 500. comme on voit dans Valerius Probus, Il y a des vers anciens rapportez par Baronius qui marquent les lettres significatives des nombres, dont le premier est tel :
Possidet A numeros quingentos ordino recto.
Quand on mettoit un titre ou une ligne droitenau dessus de l’A, il signifoit cinq mille.
ABBE’. s. m. ABBESSE. s. f. Superieur ou Superieure d’une Abbaye d’hommes ou de filles. Il y a trois sortes d’Abbez : Regulier, Seculier, Commendataire. Ce mot vient de ce que les premiers Moines appellerent leur Supérieur Ab-bot, qui signifie Pere. Ainsi ces mots de Abba Pater, qu’on trouve dans les Epistres aux Romains & aux Galates, & ailleurs, qui semblent dire la mesme chose, ne sont pas pourtant un pleonasme, comme dit S. Augustin, veu que l’un est un nom de nature, & l’autre