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souvenirs d’une actrice.

passage de la vie à la mort en si peu de temps me fit fondre en larmes.

Lorsque j’eus rempli tous les devoirs de cette triste circonstance, je songeai enfin à moi. J’étais sans argent et sans aucun moyen d’en gagner. On me conseilla de m’adresser à l’empereur Alexandre, car ayant été huit ans à son service, au théâtre impérial, j’avais quelques droits à sa protection. Si j’avais eu le courage de lui demander audience, comme plusieurs de mes compagnes, il me l’aurait accordée, car il ne s’occupait que d’adoucir le sort de tous les infortunés.

Lors de l’arrivée de l’empereur Alexandre à Vilna, on voulut lui donner une fête. « Non, dit-il, employez cet argent à soulager les malheureux qui sont sans pain et sans asyle. Qui pourrait se réjouir au milieu de tant de souffrances ? ce serait insulter au malheur. »

Ce fut le maréchal Koutouzoff qui me protégea pendant mon séjour à Vilna. J’avais été si bien accueillie par sa famille à Saint-Pétersbourg, que ce fut un titre de plus à sa bienveillance. Ne pouvant ni ne voulant rester dans la maison du général Lefeb-