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CH. X. LA GENS À ROME ET EN GRÈCE.

mée ; il la laisse pourtant entre les mains de l’imprudent Minucius : c’est que le jour anniversaire du sacrifice de sa gens est arrivé et qu’il faut qu’il coure à Rome pour accomplir l’acte sacré[1].

Ce culte devait être perpétué de génération en génération, et c’était un devoir de laisser des fils après soi pour le continuer. Un ennemi personnel de Cicéron, Claudius, a quitté sa gens pour entrer dans une famille plébéienne ; Cicéron lui dit : « Pourquoi exposes-tu la religion de la gens Claudia à s’éteindre par ta faute ? »

Les dieux de la gens, Dii gentiles, θεοὶ γενέθλιοι, ne protégeaient qu’elle et ne voulaient être invoqués que par elle. Aucun étranger ne pouvait être admis aux cérémonies religieuses. On croyait que si un étranger avait une part de la victime ou même s’il assistait seulement au sacrifice, les dieux de la gens en étaient offensés et tous les membres étaient sous le coup d’une impiété grave.

De même que chaque gens avait son culte et ses fêtes religieuses, elle avait aussi son tombeau commun. On lit dans un plaidoyer de Démosthènes : « Cet homme ayant perdu ses enfants les ensevelit dans le tombeau de ses pères, dans ce tombeau qui est commun à tous ceux de sa gens. » La suite du plaidoyer montre qu’aucun étranger ne pouvait être enseveli dans ce tombeau. Dans un autre discours, le même orateur parle du tombeau où la gens des Busélides ensevelit ses membres et où elle accomplit chaque année un sacrifice funèbre ; « ce lieu de sépulture est un champ assez vaste qui est entouré d’une enceinte, suivant la coutume ancienne[2]. »

  1. Tite-Live, V, 46 ; XXII, 18. Valère-Maxime, I, 1, 11. Polybe, III, 94. Denys d’Hal., II, 21 ; IX, 19 ; VI, 28. Pline, XXXIV, 13. Macrobe, III, 5.
  2. Démosth., in Macart., 79 ; in Eubul., 28.