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CH. III. LA CITÉ SE FORME.

grandi à la façon d’un cercle qui s’élargirait peu à peu, gagnant de proche en proche. Ce sont au contraire de petits groupes qui, constitués longtemps à l’avance, se sont agrégés les uns aux autres. Plusieurs familles ont formé la phratrie, plusieurs phratries la tribu, plusieurs tribus la cité. Famille, phratrie, tribu, cité, sont d’ailleurs des sociétés exactement semblables entre elles et qui sont nées l’une de l’autre par une série de fédérations.

Il faut même remarquer qu’à mesure que ces différents groupes s’associaient ainsi entre eux, aucun d’eux ne perdait pourtant ni son individualité ni son indépendance. Bien que plusieurs familles se fussent unies en une phratrie, chacune d’elles restait constituée comme à l’époque de son isolement ; rien n’était changé en elle, ni son culte, ni son sacerdoce, ni son droit de propriété, ni sa justice intérieure. Des curies s’associaient ensuite ; mais chacune gardait son culte, ses réunions, ses fêtes, son chef. De la tribu on passa à la cité, mais les tribus ne furent pas pour cela dissoutes, et chacune d’elles continua à former un corps, à peu près comme si la cité n’existait pas. En religion il subsista une multitude de petits cultes au-dessus desquels s’établit un culte commun ; en politique, une foule de petits gouvernements continuèrent à fonctionner et au-dessus d’eux un gouvernement commun s’éleva.

La cité était une confédération. C’est pour cela qu’elle fut obligée, au moins pendant plusieurs siècles, de respecter l’indépendance religieuse et civile des tribus, des curies et des familles, et qu’elle n’eut pas d’abord le droit d’intervenir dans les affaires particulières de chacun de ces petits corps. Elle n’avait rien à voir dans