Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1864.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
8
LIVRE I. ANTIQUES CROYANCES.

s’enraciner dans les esprits des populations gréco-italiennes ; et elle n’est pas non plus la plus ancienne opinion des Aryas de l’Orient, puisque les hymnes des Védas sont en opposition avec elle. Croyait-on que l’esprit montait vers le ciel, vers la région de la lumière ? Pas davantage ; la pensée que les âmes entraient dans une demeure céleste est d’une époque relativement assez récente en Occident puisqu’on la voit exprimée pour la première fois par le poëte Phocylide ; le séjour céleste ne fut jamais regardé que comme la récompense de quelques grands hommes et des bienfaiteurs de l’humanité. D’après les plus vieilles croyances des Italiens et des Grecs, ce n’était pas dans un monde étranger à celui-ci que l’âme allait passer sa seconde existence ; elle restait tout près des hommes et continuait à vivre sous la terre[1].

On a même cru pendant fort longtemps que dans cette seconde existence l’âme restait associée au corps. Née avec lui, la mort ne l’en séparait pas ; elle s’enfermait avec lui dans le tombeau.

Si vieilles que soient ces croyances, il nous en est resté des témoins authentiques. Ces témoins sont les rites de la sépulture, qui ont survécu de beaucoup à ces croyances primitives, mais qui certainement sont nés avec elles et peuvent nous les faire comprendre.

Les rites de la sépulture montrent clairement que lorsqu’on mettait un corps au sépulcre on croyait en même temps y mettre quelque chose de vivant. Virgile qui décrit toujours avec tant de précision et de scrupule les cérémonies religieuses, termine le récit des funé-

  1. Sub terra censebant reliquam, vitam agi mortuorum. Cic., Tuscul., I, 16. Euripide, Alceste, 163 ; Hecube, 114.