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CH. VIII. LES RITUELS ET LES ANNALES.

y consignait les prodiges que les dieux du pays avaient opérés et par lesquels ils avaient manifesté leur puissance, leur bonté, ou leur colère. On y décrivait les cérémonies par lesquelles les prêtres avaient habilement détourné un mauvais présage ou apaisé les rancunes des dieux. On y mettait quelles épidémies avaient frappé la cité et par quelles formules saintes on les avait guéries, quel jour un temple avait été consacré et pour quel motif un sacrifice avait été établi. On y inscrivait tous les événements qui pouvaient se rapporter à la religion, les victoires qui prouvaient l’assistance des dieux et dans lesquelles on avait souvent vu ces dieux combattre, les défaites qui indiquaient leur colère et pour lesquelles il avait fallu instituer un sacrifice expiatoire. Tout cela était écrit pour l’enseignement et la piété des descendants. Toute cette histoire était la preuve matérielle de l’existence des dieux nationaux ; car les événements qu’elle contenait étaient la forme visible sous laquelle ces dieux s’étaient révélés d’âge en âge. Même parmi ces faits il y en avait beaucoup qui donnaient lieu à des fêtes et à des sacrifices annuels. L’histoire de la cité disait au citoyen tout ce qu’il devait croire et tout ce qu’il devait adorer.

Aussi cette histoire était-elle écrite par des prêtres. Rome avait ses annales des pontifes ; les prêtres sabins, les prêtres samnites, les prêtres étrusques en avaient de semblables[1]. Chez les Grecs il nous est resté le souvenir des livres ou annales sacrées d’A-

  1. Denys, II, 49. Tite-Live, X, 38. Cicéron, De divin., II, 41 ; I, 33 ; II, 23. Censorinus, 12, 17. Suétone, Claude, 42. Macrobe, I, 12 ; V, 19. Solin, II, 9. Servius, VII, 678 ; VIII, 398. Lettres de Marc-Aurèle à Fronton, IV, 4.