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CH. X. LE MAGISTRAT.

par quelque côté. Les tribuns de la plèbe étaient les seuls qui n’eussent à accomplir aucun sacrifice ; aussi ne les comptait-on pas parmi les vrais magistrats. Nous verrons plus loin que leur autorité était d’une nature tout à fait exceptionnelle.

Le caractère sacerdotal qui s’attachait au magistrat, se montre surtout dans la manière dont il était élu. Aux yeux des anciens il ne semblait pas que les suffrages des hommes fussent suffisants pour établir le chef de la cité. Tant que dura la royauté primitive, il parut naturel que ce chef fût désigné par la naissance, en vertu de la loi religieuse qui prescrivait que le fils succédât au père dans tout sacerdoce ; la naissance semblait révéler assez la volonté des dieux. Lorsque les révolutions eurent supprimé partout cette royauté, les hommes paraissent avoir cherché, pour suppléer à la naissance, un mode d’élection que les dieux n’eussent pas à désavouer. Les Athéniens, comme beaucoup de peuples grecs, n’en virent pas de meilleur que le tirage au sort. Mais il importe de ne pas se faire une idée fausse de ce procédé, dont on a fait un sujet d’accusation contre la démocratie athénienne ; et pour cela il est nécessaire de pénétrer dans la pensée des anciens. Pour eux le sort n’était pas le hasard ; le sort était la révélation de la volonté divine. De même qu’on y avait recours dans les temples pour surprendre les secrets d’en haut, de même la cité y recourait pour le choix de son magistrat. On était persuadé que les dieux désignaient le plus digne en faisant sortir son nom de l’urne. Cette opinion était celle de Platon lui-même qui disait : « L’homme que le sort a désigné, nous disons qu’il est cher à la divinité et nous trouvons juste qu’il commande. Pour toutes les