Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/290

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clients est celle que Romulus a fondée suivant les rites sur le plateau du Palatin. Le domicile de la plèbe est l’asile, espèce d’enclos qui est situé sur la pente du mont Capitolin et où Romulus a admis les gens sans feu ni lieu qu’il ne pouvait pas faire entrer dans sa ville. Plus tard, quand de nouveaux plébéiens vinrent à Rome, comme ils étaient étrangers à la religion de la cité, on les établit sur l’Aventin, c’est-à-dire en dehors du pomœrium et de la ville religieuse.

Un mot caractérise ces plébéiens : ils sont sans foyer ; ils ne possèdent pas, du moins à l’origine, d’autel domestique. Leurs adversaires leur reprochent toujours de ne pas avoir d’ancêtres, ce qui veut dire assurément qu’ils n’ont pas le culte des ancêtres et ne possèdent pas un tombeau de famille où ils puissent porter le repas funèbre. Ils n’ont pas de père, pater, c’est-à-dire qu’ils remonteraient en vain la série de leurs ascendants, ils n’y rencontreraient jamais un chef de famille religieuse. Ils n’ont pas de famille, gentem non habent, c’est-à-dire qu’ils n’ont que la famille naturelle ; quant à celle que forme et constitue la, religion, ils ne l’ont pas.

Le mariage sacré n’existe pas pour eux ; ils n’en connaissent pas les rites. N’ayant pas le foyer, l’union que le foyer établit leur est interdite. Aussi le patricien qui ne connaît pas d’autre union régulière que celle qui lie l’époux à l’épouse en présence de la divinité domestique, peut-il dire en parlant des plébéiens : Connubia promiscua habent more ferarum.

Pas de famille pour eux, pas d’autorité paternelle. Ils peuvent avoir sur leurs enfants le pouvoir que donne la force ; mais cette autorité sainte dont la religion revêt le père, ils ne l’ont pas.

Pour eux le droit de propriété n’existe pas. Car toute propriété doit être établie et consacrée par un foyer, par un tombeau, par des dieux termes, c’est-à-dire par tous les éléments du culte domestique. Si