Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1870.djvu/451

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le latin y dominait ; mais les racines sabelliennes y étaient nombreuses, et on y trouvait plus de radicaux grecs que dans aucun autre des dialectes de l’Italie centrale. Quant à son nom même, on ne savait pas à quelle langue il appartenait. Suivant les uns, Rome était un mot troyen ; suivant d’autres, un mot grec ; il y a des raisons de le croire latin, mais quelques anciens le croyaient étrusque.

Les noms des familles romaines attestent aussi une grande diversité d’origine. Au temps d’Auguste il y avait encore une cinquantaine de familles qui, en remontant la série de leurs ancêtres, arrivaient à des compagnons d’Énée.[1] D’autres se disaient issues des Arcadiens d’Évandre, et depuis un temps immémorial, les hommes de ces familles portaient sur leur chaussure, comme signe distinctif, un petit croissant d’argent.[2] Les familles Potitia et Pinaria descendaient de ceux qu’on appelait les compagnons d’Hercule, et leur descendance était prouvée par le culte héréditaire de ce dieu. Les Tullius, les Quinctius, les Servilius étaient venus d’Albe après la conquête de cette ville. Beaucoup de familles joignaient à leur nom un surnom qui rappelait leur origine étrangère ; il y avait ainsi les Sulpicius Camerinus, les Cominius Auruncus, les Sicinius Sabinus, les Claudius Regillensis, les Aquillius Tuscus. La famille Nautia était troyenne ; les Aurélius étaient Sabins ; les Caecilius venaient de Préneste ; les Octaviens étaient originaires de Vélitres.

L’effet de ce mélange des populations les plus diverses était que Rome avait des liens d’origine avec tous les peuples qu’elle connaissait. Elle pouvait se dire latine avec les Latins, sabine avec les Sabins, étrusque avec les Étrusques, et grecque avec les Grecs.

  1. Denys, I, 85.
  2. Plutarque, Quest. rom., 76.